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12/04/2020
«Songs»
Stephen Foster : Jeanie with the Light Brown Hair
Leonard Bernstein : Sonate pour clarinette et piano
Charles Ives : Songs My Mother Taught MeLargo pour violon, clarinette et piano, opus 73
Aaron Copland : Nocturne
André Previn : Tango, Song and Dance: «Song» – Sonate pour clarinette et piano
Samuel Barber : Canzone, opus 38a
George Gershwin : Three Preludes

Patrick Messina (clarinette), Fabrizio Chiovetta (piano), Mariko Inaba-Messina (violon)
Enregistré dans l’auditorium du Conservatoire Darius Milhaud, Aix-en-Provence (25-27 août 2019) – 59’
Aparté AP231 – Notice bilingue (en anglais et français) de Justine Harrison


Sélectionné par la rédaction






Avouons une petite déception liminaire avec ce disque où l’on retrouve les deux compères que sont Patrick Messina et Fabrizio Chiovetta: le titre de ce récital n’est pas idéal. Il aurait plutôt fallu parler de «Parfums new-yorkais» ou de de «Couleurs new-yorkaises», voire de «Ballade dans la grosse pomme» ou tout bonnement d’«Atmosphères», tant l’écoute de ces différentes pièces fait immédiatement naître des images (d’aucuns diront des clichés, mais tant pis...) dans l’esprit de l’auditeur. Après la marche trépidante de la foule à New York (le rythme obsédant du piano dans le premier mouvement de la Sonate de Bernstein à partir de 0’42), c’est la rêverie du promeneur du côté de Central Park ou de Chelsea (le Nocturne de Copland) ou la démarche d’une femme toute pimpante juchée sur de hauts talons dans la Cinquième Avenue (la deuxième partie du Troisième Prélude de Gershwin) qui s’impose à nous: bref, toute une description musicale de la vie à la fois tumultueuse et nonchalante de la ville qui ne dort jamais.


A travers ce panorama de la musique américaine pour clarinette et piano, Patrick Messina et Fabrizio Chiovetta font montre de toute l’étendue de leurs talents. Talents techniques en premier lieu: même si l’on perçoit de-ci de-là les diableries que doit vaincre le piano, ce sont surtout les chausse-trappes offertes à la clarinette que l’on entend. Mais Patrick Messina, clarinette solo de l’Orchestre national de France, n’en a cure et force ainsi l’admiration par son travail sur les aigus et les suraigus (le second mouvement de la Sonate de Bernstein à partir de 5’ ou dans le deuxième mouvement de la Sonate d’André Previn), sur l’art du détaché, y compris dans des pianissimi imperceptibles (notamment dans «Song» du même Previn, à partir de 3’55, morceau issu de Tango, Song and Dance, pièce composée en 2001 pour violon et piano, créée par Anne-Sophie Mutter, alors épouse du compositeur, et transcrite ici pour la clarinette) ou sur les sauts audacieux à la fois mélodiques et rythmiques (le dernier mouvement de la Sonate de Previn, y compris sa pirouette conclusive). Un des côtés les plus appréciables de ce disque est, au fil de compositions que l’on n’a guère l’occasion d’entendre, de surtout nous confronter à une grande diversité de climats puisque les notes rêveuses, presqu’en apesanteur parfois, vont tout à coup précéder un brusque changement rythmique où la danse et un rythme quasiment furieux prennent le dessus avant le retour à une certaine quiétude. Le dialogue entre les aigus de la clarinette et le grave du piano (Copland) rend parfaitement justice à l’entente entre les deux musiciens, le partenariat tournant souvent à l’avantage de la clarinette mais sachant également ménager un meilleur équilibre entre les deux instruments où le piano retrouve toute sa place («Song» de Previn ou l’Allegro ben ritmato e deciso de Gershwin).


Les influences du jazz ou des musiques folkloriques (soulignons à ce titre l’excellente et instructive notice d’accompagnement, en anglais et en français, de Justine Harrison) ne sont pas toujours patentes, retravaillées qu’elles sont ici par certains des plus grands compositeurs américains du XXe siècle, mais on ne peut pour autant totalement les ignorer (l’humour très jazzy de l’Allegro ben ritmato e deciso de Gershwin avec ses glissandi et son rythme effréné). A noter également, dans la pièce inaugurale du disque (Jeanie with the light brown hair de l’inconnu Stephen Foster, né en 1826 et disparu en 1864 seulement, dans le dénuement le plus total), le choix technique des interprètes: les légers craquements et ses sonorités compressées, l’anche un peu faible du clarinettiste et l’effet vintage ajouté par l’ingénieur du son Ignace Hauville donnent à cette pièce d’à peine 1’30 un charme fou qui, là aussi, fait naître des images tirées du Sud américain tel qu’on peut le voir dans une production hollywoodienne. Inutile donc pour l’auditeur de chercher à nettoyer le disque ou à trafiquer sa platine: le côté vieillot est bel et bien voulu!


Précisons enfin la participation de Mariko Inaba-Messina, ancien premier violon au Met de New York (et épouse de Patrick Messina à la ville), au très beau Largo pour violon, clarinette et piano de Charles Ives qui conclut un disque plein d’imagination et de charme, dédié à la mémoire d’André Previn (qui représente «le génie américain [...] "touche-à-tout" mais excellent dans tout», pour reprendre les mots de Patrick Messina). De fait, on attend peut-être un jour par le même soliste le Quintette avec clarinette de Previn (2011) ou Gnarly Buttons (1996) de John Adams: à bon entendeur...


Le site de Fabrizio Chiovetta


Sébastien Gauthier

 

 

 

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