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07/04/2020
Arnold Bax : Fantasy Sonata for harp and viola, GP 284
Camille Saint-Saëns : Fantaisie en la majeur, opus 124, R. 136
Franz Schubert : Sonate «Arpeggione» en la mineur, D. 821
Benjamin Britten : Lachrymae. Reflections on a song of Dowland, opus 48

Peijun Xu (alto), Godelieve Schrama (harpe)
Enregistré en la salle de concert de Marienmünster, Höxter, Allemagne (29-31 juillet 2019) – 75’06
Profil Hänssler PH 19069 – Notice (en allemand et en anglais) de Jens Markowsky


Sélectionné par la rédaction





Peijun Xu, née à Shanghai, et Godelieve Schrama, née à La Haye, sont toutes les deux professeurs de leur instrument en Allemagne, Shrama toujours à Detmold où elles se sont rencontrées et Xu actuellement à Cologne. Elles présentent ensemble un beau concert pour alto et harpe qui capte l’attention par la grande valeur des œuvres élues et par la qualité de l’interprétation. Une seule des pièces au programme fut composée directement pour alto et harpe, mais l’alto, de la même famille de cordes, remplace une fois le violon, une fois l’arpeggione, et les deux passages du piano à la harpe restent très proches des partitions d’origine. Ensemble, les deux musiciennes proposent un festin de timbres nuancés qui aiguisent l’écoute.


Ecrit pour un instrument qui s’est avéré éphémère, la Sonate pour arpeggione et piano (1824) de Franz Schubert (1797-1828) est souvent interprétée par un duo de violoncelle et piano. Sa voix étant proche du registre plus élevé de l’arpeggione sans manquer d’une certaine richesse, à l’occasion, l’alto peut s’y imposer également. Godelieve Schrama à la harpe respecte avec beaucoup d’adresse la partie de piano et, quoique d’un son plus mat, plus velouté que celui du piano dont on peut regretter la résonance particulière, l’alliance avec l’alto chantant et précis de Peijun Xu résulte en une version agréablement différenciée de cette touchante œuvre célébrissime, renforcée par leur interprétation, essentiellement classique, qui ne manque ni d’élan, ni de charme ni d’expressivité.


Pianiste d’abord mais également altiste, Benjamin Britten (1913-1976) compose en 1950 une œuvre qui met pleinement en valeur son second instrument. Lachrymae pour alto et piano lui permet un retour sur les modes de la renaissance anglaise dans un langage inventif qui ne fuit ni dissonances ni avancées techniques tout en rendant hommage à la mélancolie emblématique de la musique de John Dowland (1563-1626). Précédées d’une introduction, ses «réflexions» sont de fait dix variations dans une alternance vif/lent, principalement sur l’air avec luth If my complaints could passions move, thème sous-jacent ou fragmenté que l’on n’entend pleinement et harmonieusement qu’en coda. En 1976, Britten arrange la partition pour alto principal et cordes sans premiers violons, s’approchant ainsi, dans un sens, du luth et des cinq violes de l’œuvre de même titre de Dowland. Bien qu’elle soit moins percutante que l’originale, c’est cette version que la harpe remplaçant le piano remet d’abord en mémoire. Godelieve Schrama s’y montre toujours aussi compétente et engagée. Peijun Xu, intense et éloquente, brillante ou lyrique, livre une prestation tout à fait convaincante.


Moins reconnue, peut-être que certaines de ses sept sonates avec piano, la Fantaisie pour violon et harpe (1907) de Camille Saint-Saëns (1835-1921) reste un joyau raffiné, hautement musical, qui allie la virtuosité à l’élégance de ses lyriques élans au travers de quatre séquences qui se fondent chacune dans la suivante malgré les différences rythmiques, stylistiques et climatiques. De mouvance fauréenne, peut-être, on y entrevoit Debussy. La harpe, belle, s’y déploie dans toute sa spécificité, s’opposant librement à la spécificité sonore de l’alto (qui remplace sans heurt le violon d’origine), ou tissant avec lui une matière plus dense. L’interprétation est à la hauteur de la composition qui exige des instrumentistes musicalité, rigueur et maîtrise.


Arnold Bax (1883-1953), compositeur anglais, nourrissait un profond attachement à tout ce qui relevait de l’Irlande et de la tradition irlandaise et il la célébrait en sa musique. La harpe celte lui inspira plusieurs pages pour ou avec la harpe classique dont l’émouvante Sonate élégiaque (1916), relativement célèbre, et la Sonate-Fantaisie pour harpe et alto de 1927 que les deux musiciennes interprètent ici avec brio. Bax se revendique de la veine romantique et sa Sonate en est une illustration parfaite quoique non sans marquer l’originalité de son approche. Parfaitement conçus pour la mise en valeur des deux instruments et leurs caractéristiques sonores, le contraste entre les deux et leur complémentarité possible, les quatre mouvements, énergique, dansant, pensif ou rhapsodique, s’enchaînent en partie grâce à la reprise comme un leitmotiv du premier thème énoncé par l’alto qui permet le passage et termine l’œuvre. D’une belle ampleur inspirée, gracieuse et de respiration presque franckiste, la Sonate, qui accorde une importance égale aux deux instruments, mériterait de se trouver plus souvent à l’affiche.


Le programme, d’avance intéressant en soi, s’impose par son impact sonore qui, hautement respectueux des pièces de Saint-Saëns et de Bax, approfondit l’écoute, qu’il avive, des partitions à l’origine avec piano. On sait gré à Peijun Xu et Godelieve Schrama d’avoir attiré, grâce à leur prestation inspirée, une attention largement méritée sur l’ensemble de leur programme dont seule la Sonate «Arpeggione» bénéficie d’une discographie fournie. Une prise de son équilibrée, précise et généreuse ne peut qu’augmenter le plaisir de l’audition.


La page de Peijun Xu sur le site de l’Académie Kronberg
Le site de Godelieve Schrama


Christine Labroche

 

 

 

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