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05/09/2017
«Alto Cantatas»
Alessandro Scarlatti : Concertos pour flûte, deux violons et basse continue en ut mineur et en la mineur – Perchè tacete, regolati concenti? – Sonate a quattro en sol mineur et en ré mineur – Filen, mio caro bene

Gabriella Martellacci (alto), Insieme Strumentale di Roma, Giorgio Sasso (direction)
Enregistré à la Basilica dei Santi Bonifacio e Alessio, Rome (octobre 2012) – 67’
Brilliant Classics BRI 94440 – Notice (en anglais) de Salvatore Carchiolo





Alessandro Scarlatti : 12 Sinfonie di concerto grosso
Corina Marti (flûte à bec), Ann Allen (hautbois, flûte à bec), Giuseppe Frau (trompette), Alexandra Nigito (clavecin), Capella Tiberina, Paolo Perrone (direction)
Enregistré en studio (21-24 janvier et 7-9 juillet 2014) – 88’47
Album de deux disques Brilliant Classics BRI 94658 – Notice (en italien) d’Alessandro Lattanzi





Alessandro Scarlatti : Il trionfo dell’onore
Sante Messina (Flaminio Castravacca), Ornella Rovero (Cornelia Buffacci), Amalia Pini (Leonora Dorini), Rosanna Zerbini (Doralice Rossetti), Amedeo Berdini (Riccardo Albenori), Mario Borriello (Erminio Dorini), Eugenia Zareska (Rosina Caruccia), Afro Poli (Capitaine Rodimarte Bombarda), Orchestra Lirica di Milano Radiotelevisione Italiana, Carlo Maria Giulini (direction)
Enregistré à Milan (1950) – 81’55
Album de deux disques Profil Hänssler PH 16055





Alessandro Scarlatti : Passio Secundum Johannem
Giuseppina Bridelli (Testo), Salvo Vitale (Christus), Caroline Weynants (Ancilla), Guillaume Houcke (Pilatus), Pierre Derhet (Petrus), Maxime Melnik (Judaeus), Chœur de chambre de Namur, Millenium Orchestra, Leonardo García Alarcón (clavecin et direction)
Enregistré en public au Provinciaal Museum Begijnhofkerk Sint-Truiden (27 mars 2016) – 59’05
Ricercar RIC 378 (distribué par Outhere) – Notice (en allemand, italien, français et anglais) de Luca Della Libera





Qu’il est parfois difficile d’être le père d’un compositeur célèbre et, en dépit de ses talents, de ne souvent être que «le père de»! Tel est pourtant le cas d’Alessandro Scarlatti (1660-1725) dont la carrière essentiellement napolitaine et la multiplicité des compositions, tant du point de vue du nombre que des genres abordés, ont été masquées par le fils, Domenico, compositeur célèbre pour ses plus de 500 sonates dédiées au clavier, qui font la joie des clavecinistes et pianistes depuis des décennies. Les cinq disques présentés ici permettent de reconsidérer l’œuvre du père Scarlatti avec des fortunes diverses certes, mais avec un intérêt constant qu’illustre parfaitement l’éclectisme des formes.


La cantate fut un genre fortement prisé par Alessandro Scarlatti au point qu’on lui en attribue plus de 800, dont une proportion non négligeable pour la tessiture de contralto. Les deux exemples enregistrés sur ce disque témoignent d’un modèle parfaitement défini, où une musique assez simple sous-tend un texte propre à exalter les émotions humaines (l’amour bien sûr en premier lieu), sans artifice inutile. Un peu plus de vingt minutes pour la première, un peu moins de treize pour la seconde: il n’en faut pas davantage pour Gabriella Martellacci pour exprimer avec suffisamment de justesse les climats souhaités par le compositeur, même si l’on souhaiterait parfois moins de neutralité – qu’en ferait, par exemple, une Sara Mingardo? Juste dans son chant, Martellacci souffre pourtant quelques critiques car on ne peut que regretter ce glissando malencontreux dans le troisième récitatif de la première cantate, l’air qui suit s’avérant pour sa part assez plat en dépit de textes prenants, tandis que l’accompagnement est de la même tonalité neutre, caractérisé notamment par un clavecin que l’on trouvera assez métallique. Le bilan de la seconde cantate est également mitigé puisqu’il va du bien (l’Aria - Adagio, très beau dialogue entre la voix et la flûte à bec) au très moyen (la seconde aria s’avérant plus que besogneux). Les compléments orchestraux (sonates ou concertos) sont assez neutres même si l’on peut y trouver quelques beaux moments à l’image de l’Andante du Concerto en ut mineur.


Les douze Sinfonie di concerto grosso ne sont pas des figures nouvelles dans le paysage baroque puisque, outre le fait que certaines ont été enregistrées de manière éparse, elles ont déjà fait l’objet de plusieurs intégrales dont deux sont assez connues: celle réalisée en 1981 par I Musici (avec William Bennett à la flûte, Hans Elhorst au hautbois et Bernard Soustrot à la trompette, Philips), et celle d’I Solisti di Milano dirigés par Angelo Ephrikian (avec notamment l’excellent Glauco Cambursano à la première flûte, Arcophon). La présente version de la Capella Tiberina est emplie de jovialité et rend pleinement justice à ces petites pièces (la plupart des Sinfonie comportant cinq mouvements dont la durée oscille pour le plus bref entre 0’39 et, pour le plus long, 2’42) où les flûtes sont les actrices principales. De temps à autre, on entendrait presque Vivaldi (la fin de l’Allegro conclusif de la Sixième Sinfonia en la mineur), Händel (le premier Allegro de la très belle Quatrième Sinfonia en mi mineur, digne d’un concerto grosso du Caro Sassone) ou Telemann (les Sinfonie n° 7, 8 ou 12). Mais le style de Scarlatti lui est propre: une invention mélodique réelle (le premier mouvement de la Neuvième Sinfonia, où les flûtes sont presque seules, soutenues seulement par un léger accompagnement, ou le dernier mouvement de la Dixième doté d’arêtes tranchantes, de traits vifs, de tons extrêmes sans qu’on ressente pour autant la moindre brutalité), un agencement des timbres extrêmement soigné (là, dans le dernier mouvement de la Septième, on entend bien davantage Telemann que l’Italie grâce à ces trilles endiablés). La réalisation ne souffre aucun reproche: la dextérité des solistes, tous remarquables, rend un juste hommage à ces œuvres qui bénéficient là d’une interprétation de premier ordre.


Il trionfo dell’onore (1718) est considérée comme la seule comédie composée par Alessandro Scarlatti, certains détectant même dans l’ouvrage les bases de l’opera buffa tel qu’on pourra l’entendre plus tard. Amourettes et coquins se partagent l’affiche dans un opéra qui s’inscrit dans les premiers enregistrements effectués par Carlo Maria Giulini à la tête de l’Orchestre symphonique de la RAI, dont il devient directeur musical en 1946 après avoir été quelque temps l’assistant du chef Fernando Previtali. Epoque d’apprentissage donc, qui voit Giulini enregistrer des raretés comme Axur, re d’Ormus de Salieri, Don Procopio de Bizet, L’allegra brigata de Malipiero ou Les Horaces et les Curiaces de Cimarosa! Avouons immédiatement que cet enregistrement est plus anecdotique qu’autre chose même si l’on est un grand admirateur du chef italien. Le geste est musical, certes, mais bien raide comme en témoigne par exemple la Sinfonia d’ouverture, des fins de phrases assez pompeuses (l’air «Il farsi sposa, l’aver marito» de Rosina au troisième acte) ou un accompagnement que l’on peut parfois trouver plus que poussif (le duo «Or via dameggia» entre Rodimarte et Rosina à l’acte II). Quant aux chanteurs, on ne perçoit que trop rarement la verve et le sens de la comédie que cet opéra est pourtant censé illustrer. Certes, le côté théâtral, on l’a lorsque Sante Messina chante «Con quegli occhi ladroncelli» (acte I) ou lorsqu’Eugenia Zareska chante l’air «Avete nel volto» à l’acte II, faisant pour l’occasion preuve d’une belle technique et d’un non moins bel investissement. Pour le reste, plusieurs chanteurs manquent de souffle au sens propre du terme (Afro Poli ou Amedeo Berdini à l’acte I) et l’action est déclamée de façon assez poussive, sans que l’auditeur ne se sente jamais véritablement concerné. C’est d’autant plus dommage que l’œuvre, qui a subi ici de nombreuses coupures par rapport à la partition originale, recèle quelques moments assez incroyables comme cette orchestration dans l’air de Doralice «Sì, dolce mia vita» (acte I) ou cet ensemble qui conclut l’acte II, presque mozartien avant l’heure.


Avec cette Passion selon Saint Jean (1685), les talents de défricheur de Leonardo García Alarcón ont encore frappé. Car voici, évidemment dans un tout autre genre et une tout autre optique que celle de Bach, une Passion selon saint Jean d’une beauté remarquable et d’une ferveur indéniable. Comme le signale la notice (excellente comme toujours chez cet éditeur) de Luca Della Libera, García Alarcón a choisi d’insérer entre les épisodes de la Passion diverses Responsori per la Settimana Santa, compositions éparses réunies en 1705 en un seul recueil qui permettent ainsi, sans nuire à la cohérence de l’ensemble, d’aérer le récit biblique proprement dit. Le rôle-titre est dévolu à la figure de l’Evangéliste, parfaitement incarnée par Giuseppina Bridelli, qui sait traduire avec une réelle force expressive un récit qui n’est pourtant soutenu, à une exception près, que par la basse continue. De manière générale, chaque personnage est bien caractérisé et donne ainsi à l’ensemble une très belle dynamique. Ainsi, par exemple, on remarquera le soin apporté à la relative rapidité du chant de Pilate et du chœur des Juifs dans le passage «Adducunt ergo Jesum a Caipha», qui traduit le malaise de la situation et l’envie d’en finir, avec la déclamation de l’Evangéliste, au contraire assez lente puisque traitant de la douloureuse question du sort à réserver à Jésus. Précisons à ce titre que la très belle voix de basse de Salvo Vitale illustre avec une grande noblesse le personnage central de l’œuvre. Dirigeant avec un mélange de sobriété et de théâtralité le Millenium Orchestra et le – comme toujours – excellent Chœur de chambre de Namur, Leonardo García Alarcón signe là un très beau disque qui rend pleinement hommage à l’œuvre religieuse d’Alessandro Scarlatti.


Le site de Gabriella Martellacci
Le site de Giorgio Sasso et de l’Ensemble instrumental de Rome
Le site de la Capella Tiberina
Le site de Giuseppina Bridelli
Le site du Chœur de chambre de Namur et du Millenium Orchestra
Le site de la Cappella Mediterranea et de Leonardo García Alarcón


Sébastien Gauthier

 

 

 

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