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08/09/2016
Claude Debussy : Quatuor à cordes, opus 10 [*] – Syrinx – Sonate n° 1 pour violoncelle et piano – Sonate n° 2 pour flûte, alto et harpe – Sonate n° 3 pour violon et piano
Kuijken Ensemble: Barthold Kuijken (flûte), Sigiswald Kuijken (violon, alto), Veronica Kuijken (violon) [*], Sara Kuijken (alto) [*], Wieland Kuijken (violoncelle), Sophie Hallynck (harpe), Piet Kuijken (piano)
Enregistré à Lommel, Belgique (12-17 septembre 1999) – 71’31
Arcana A392 (distribué par Outhere) – Notice bilingue de Harry Halbreich suivie d’une apologie de Sigiswald Kuijken





Sigiswald Kuijken, à la tête d’une famille tout adonnée à la musique, réunit autour de lui en 1999 les instrumentistes, frères et enfants, nécessaires aux effectifs d’une intégrale de la musique de chambre de Claude Debussy (1862-1918), hormis le Trio de jeunesse et les deux morceaux de concours avec clarinette. Faute de harpiste dans la famille, Kuijken fit appel à Sophie Hallynck comme il le fait à l’occasion pour La Petite Bande. La réédition de l’enregistrement de cette entreprise mémorable ne peut être qu’une bonne nouvelle.


Le nom Kuijken met aussitôt à l’esprit une reconstruction historique sur instruments de l’époque des œuvres mais le violoniste belge s’en défend. Debussy est «pleinement un compositeur de notre temps» qui n’a nul besoin «d’être "revisité" sous un point de vue "historisant"». Ainsi, le choix d’instruments, de facture ancienne ou plus récente, se fit en fonction de la sonorité de l’ensemble et des exigences de chaque musicien individuellement – les cordes en boyau ou avec âme en boyau, cela va de soi. Elastiques et intimes, ils sont moins sonores, moins amples, peut-être, que les instruments au goût d’aujourd’hui mais le style de jeu engagé, alerte et bien défini ne peut que réjouir. Le piano Erard (1894) pourrait éventuellement décevoir dans une grande salle de concert, surtout dans le grave – Piet Kuijken ne décevrait pas – mais la flûte Auguste Bonneville de 1910 est une petite merveille d’une clarté ronde qui, sous les doigts de Barthold Kuijken, va tout à fait dans le sens de la sinueuse poésie de Syrinx (1913) et du mystère féerique de la Sonate en trio de 1915.


La musicalité de la prestation, la parfaite cohésion de jeu et un phrasé impeccable laissent entendre que les Kuijken, en plus de La Petite Bande, doivent souvent faire de la musique ensemble pour le plaisir tout en restant d’une grande exigence. A cela s’ajoute une compréhension presque atavique des compositions de Debussy, dont le Quatuor (1893), créé par le Quatuor Ysaÿe, subit quelque influence de César Franck, il est vrai. L’entrée en jeu des quatre Kuijken est assez retenue mais la tension monte progressivement et se maintient, les traits d’archet nets, précis et virtuoses à bon escient sans perdre en expressivité et sans perdre de vue le caractère plus onirique de l’Andantino en particulier. Si les pizzicati du scherzo sonnent plus ronds que sur cordes modernes, la dextérité des attaques reste entière.


Le beau violoncelle Filip Kuijken (1999) de Wieland, le frère aîné, porté par la puissante tempête pianistique de son fils Piet, file de longues lignes sombres ou établit les interrogations fantasques d’un «Pierrot» perplexe «fâché avec la lune» sans jamais trahir l’intériorité de la première Sonate de 1915 qui explore les possibilités techniques de l’instrument sur toute la tessiture. Pour la prodigieuse Sonate pour flûte, alto et harpe de la même année, les trois musiciens trouvent un bel équilibre, particulièrement appréciable lors des superpositions polytonales du dernier mouvement. Les timbres des trois instruments se marient très bien, tout en gardant leur caractère propre et la prestation étincelante, lyrique, perlée et claire, capte toute la transparence poétique des textures.


Sigiswald et Piet Kuijken défendent la Sonate pour violon et piano (1916-1917) avec superbe, exaltant le raffinement expressif et la structure solide qui sous-tend son esprit si libre. L’entente entre les deux musiciens et la fusion entre les deux instruments mènent à une interprétation intelligente et profondément engagée qui ne peut que toucher l’âme mélomane. Certains préfèreront des prestations sur instruments pleinement de notre temps comme pour les autres pièces de ce beau programme mais la vision, l’implication et l’adresse de l’Ensemble Kuijken et la cohésion entre ses membres n’en sont pas moins remarquables.


La page de Sigiswald sur le site de La Petite Bande
Le site de Piet Kuijken
Le site de Filip Kuijken


Christine Labroche

 

 

 

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