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12/27/2015
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Le Lac des cygnes, opus 20
Natalia Osipova (Odette/Odile), Matthew Golding (Le prince Siegfried), Gary Avis (Rothbart), Elizabeth McGorian (La princesse), Alastair Marriott (Le tuteur), Valeri Hristov (Benno), Royal Ballet, Covent Garden
Royal Opera House Orchestra, Covent Garden, Boris Gruzin (direction musicale)
Marius Petipa, Lev Ivanov (chorégraphie), Yolanda Sonnabend (décors et costumes), Mark Henderson (lumières)
Enregistré en public à la Royal Opera House, Londres (17 mars 2015) – 133’ + 18’ bonus (introduction avec Natalia Osipova et Matthew Golding, entretien entre Anthony Dowell et Darcey Bussell, Coaching «Swan Lake»)
Opus Arte Blu-ray OA BD7174 D (ou DVD OA 1181 D) – Format 1080i HD – Son LPCM 2.0/DTS-HD Master Audio 5.1 – Region code: 0 (worldwide)





Ce film est l’enregistrement de la soirée du 17 mars 2015 au Royal Opera House, Covent Garden, retransmise dans les cinémas du monde entier. Affiche très grand public avec Le Lac des cygnes, le plus mythique des ballets russes, dont la gloire a encore été récemment renforcée par un film à grand succès. Les deux protagonistes sont deux principals du Royal Ballet, l’une Russe, l’autre Canadien, récemment recrutés par cette compagnie, l’un au Ballet d’Amsterdam, l’autre au Bolchoï, Natalia Osipova et Matthew Golding, partenaires depuis leur entrée quasi contemporaine dans la compagnie mais pour la première fois réunis à l’épreuve du Lac.


En préambule, on est de plus en plus admiratif sur la façon dont est aujourd’hui filmée la danse en général, le ballet classique en particulier. L’alternance frontal/gros plan très frustrante a laissé place à une façon de filmer beaucoup plus raffinée qui sait, certes, montrer les mouvements d’ensemble mais aussi promener la camera intelligemment à l’intérieur de l’action et montrer quand c’est opportun des détails, parfois orchestraux, tout à fait passionnants.


La déception relative est à la hauteur de l’espérance que suscite l’affiche. La production d’Anthony Dowell, qui date de 1987, veut trop bien faire. Elle s’inspire de l’originale à Covent Garden de 1895 mais y ajoute des éléments disparates qui superposent à la tradition Petipa-Ivanov des éléments signés Frederick Ashton et David Bintley. Mais surtout, la transposition à l’époque de Tchaïkovski n’est pas toujours convaincante – sortir ce conte de son contexte légendaire a pu donner des résultats spectaculaires (John Neumeier, Matthew Bournes) si cela est fait de façon radicale mais pas à moitié – avec de plus des décors de Yolanda Sonnabend, inspirés de Fabergé, trop compliqués, et des costumes assez peu orthodoxes, notamment pour les cygnes, auxquels il est toujours dangereux de toucher.


Le Royal Ballet, compagnie impeccable, n’est pas en cause dans cette relative déception, car autant le corps de ballet que les rôles secondaires (la Princesse d’Elizabeth McGorian, le Rothbart de Gary Avis) sont au-dessus de tout reproche. Mais Natalia Osipova, avec une technique et une énergie spectaculaires, ne réussit pas le doublé Odette/Odile. Si elle parvient à convaincre dans le rôle d’Odette le cygne blanc avec une grande expressivité dans le mime, son Odile, le cygne noir, manque terriblement de féminité et de mordant. Les ports de bras ne sont pas toujours très orthodoxes mais toutes les figures imposées, notamment les trente-deux fouettés du pas de deux, sont superlatives.


Matthew Golding appelle deux réserves de poids. Son expression constamment arrogante et qui se veut peut-être princière est trop uniforme pour donner vie à son caractère et sa pantomime n’est pas vraiment convaincante. Et qu’on nous pardonne cette exigence, mais un Prince Siegfried qui se présente en scène avec un brushing comme s’il sortait d’un salon de coiffure de Winnipeg, eût-il les plus longues jambes du monde, fût-il un as des portés, soulevant sa partenaire du sol pour des portés à la russe astronomiques, n’est pas entièrement crédible. A aucun moment Golding ne décolle de la pure convention; son personnage laisse sur sa faim. Et le pire est que la chimie ne semble pas se faire entre les deux personnages que l’on sent très à distance de l’émotion requise.


Reste la musique, et on n’est pas de reste avec le somptueux Orchestre de Covent Garden que Boris Gruzin dirige de façon très dramatique, traitant la fabuleuse partition de Tchaïkovski à l’égal de ses plus belles pages symphoniques.


Ce DVD ne s’impose pas plus que comme un témoignage fugace dans une vidéographie déjà pléthorique de laquelle on retiendra, si l’on veut la fine fleur de la danse russe d’aujourd’hui, l’absolument parfaite Svetlana Zakharova avec Roberto Bolle à Milan en 2004 (TDK) plus que dans un enregistrement plus récent au Bolchoï où elle danse avec Denis Rodkin en 2015 (BelAir). Le classique absolu, insurpassable pour beaucoup, reste la captation avec Margot Fonteyn et Rudolf Noureev à Vienne en 1966 (Deutsche Grammophon/Unitel). L’Opéra de Paris est aussi une option de choix avec Marie-Claude Pietragalla et Patrick Dupont en 1992 (BelAir) et Agnès Letestu et José Martinez en 2006 (Opus Arte).


Olivier Brunel

 

 

 

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