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08/15/2015
Nikolaï Rimski-Korsakov : La Fiancée du tsar
Anatoli Kotscherga (Sobakine), Olga Peretyatko (Marfa), Johannes Martin Kränzle (Gryaznoï), Tobias Schabel (Maliouta Skouratov), Pavel Cernoch (Lykov), Anita Rachvelishvili (Lioubacha), Stephan Rügamer (Bomélius), Anna Tomawa-Sintow (Sabourova), Anna Lapkovskaja (Douniacha), Carola Höhn (Petrovna), Dmitri Plotnikov (Un jeune boyard), Anna Charim, Peter Krumow (domestiques), Chor der Staatsoper Berlin,
Staatskapelle Berlin, Daniel Barenboim (direction musicale), Dmitri Tcherniakov (mise en scène, décors), Elena Zaytseva (costumes), Gleb Filshtinsky (lumières)
Enregistré à l’Opéra-Théâtre Schiller de Berlin (octobre 2013) –
Bel Air Classiques DVD BAC 105 (ou Blu-ray BAC 405) (distribué par Harmonia mundi) – 152’
Format 16/9 – Son PCM 2.0/DTS HD Master Audio – Region Code 0 – Notice et sous-titres en anglais, français et allemand





On connaît bien maintenant le «système Tcherniakov», ses grandes réussites, ses limites, ses échecs aussi (voir ici). En s’attaquant à La Fiancée du tsar, opéra rarement représenté de Rimski-Korsakov, le metteur en scène joue sur du velours. Aucune référence récente, un livret plutôt bien ficelé et une histoire à transposer du XVIe siècle à notre ère hypermédiatisée et une superbe partition nécessitant une solide distribution.


L’histoire, en simplifiant à l’extrême, est celle d’une belle jeune femme choisie par le tsar Ivan VI le Terrible alors qu’elle est déjà fiancée au fils d’un riche marchand et convoitée par un boyard. A l’aide de deux filtres intervertis par une main jalouse, la jeune tsarine meurt juste après son mariage et le méchant boyard qui l’a empoisonnée se suicide. Représenté au premier degré, l’opéra tient très bien la route avec un découpage idéal et un livret plutôt bien ficelé. Version Tcherniakov: le tsar est virtuel et virtuellement reconstitué par des ordinateurs à partir d’images d’autres tsars, rois et présidents. On est alternativement dans un studio d’enregistrement, dans une salle de contrôle informatique, dans l’intérieur du marchand qui suit l’action sur son téléviseur et le spectateur lui même voyeur de tout ce monde médiatique voit l’appartement de l’extérieur au travers de fenêtres, procédé désormais incontournable chez Tcherniakov. Son travail sur les acteurs est comme toujours celui d’un orfèvre, la démonstration théâtrale extrêmement brillante, mais on voit une autre histoire dans laquelle on peut décrypter tous les maux du siècle, du pouvoir, de l’omnipotence des images, leur danger, etc., etc.


Cette coproduction entre le Staatsoper Unter den Linden de Berlin et le Teatro Alla Scala de Milan a été filmée au Schiller Theater où l’opéra berlinois s’est retranché pendant les travaux de la salle Unter den Linden. Daniel Barenboim s’y montre à son meilleur, dirigeant l’œuvre avec toute la violence dramatique qu’elle contient à la tête d’une Staatskapelle de Berlin chauffée à blanc. La distribution est, osons l’écrire, exceptionnelle. A l’applaudimètre, le public ne s’y trompe pas, c’est Anita Rachvelishvili, un mezzo-soprano géorgien, qui tient le rôle secondaire de Lyubasha, jalouse de l’héroïne et qui va manigancer sa perte, qui éclipse le reste de la distribution. Magnifique timbre corsé, sombre et présence dramatique indéniable, elle mérite amplement de triomphe. On retrouve avec bonheur deux anciens de la scène internationale, Anna Tomowa-Sintow qui dans le rôle maternel mais important de Domna Saburova, fait montre d’une autorité et d’une puissance étonnantes compte tenu de l’ancienneté de sa carrière. Anatoli Kotscherga, lui aussi un vétéran de la scène lyrique, étonne également avec des moyens encore immenses et une présence scénique magnifique dans le rôle du marchand Vasily Sobakin. Superbe aussi le baryton Johannes Martin Kränzle que l’on connaît mieux dans le répertoire wagnérien. Le rôle du méchant, ici Grigory Gryaznoï, lui va comme un gant et il est fulgurant dans la scène finale dans laquelle il dévoile sa personnalité et ses agissements. Pavel Cernoch, ténor à la voix claire et droite, brille au jeu que lui permet la partie du fiancé évincé. La fiancée Marfa et tsarine pour quelques heures, c’est la très belle Olga Peretyatko, soprano à la voix claire et pure, magnifique actrice – là encore la patte de Dmitri Tcherniakov n’y est pas étrangère.


Une grande soirée de théâtre, qui cependant laisse interrogateur sur l’avenir du travail du metteur en scène russe car depuis l’Onéguine du Bolchoï qui l’a propulsé il y a presque dix ans, pour quelques scènes, actes – comme le bal d’Onéguine ou le champ de pavots polovtsien du Prince Igor (voir ici) qui restent inoubliables, que de redites, et combien de temps ce système aura-t-il la cote auprès du public et des directeurs de théâtre?


Olivier Brunel

 

 

 

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