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05/14/2015
Richard Strauss : Don Juan, opus 20 [1] – Ein Heldenleben, opus 40 [2]
David Nolan (violon solo), London Philharmonic Orchestra, Bernard Haitink (direction)
Enregistré en public au Royal Albert Hall (29 août 1986 [2]) et au Southbank Centre’s Royal Festival Hall (3 décembre 1992 [1]), Londres – 65’23
LPO 0079 – Notice (en anglais) de Stephen Johnson





Richard Strauss : Don Juan, opus 20 [1] – Ein Heldenleben, opus 40 [2]
Anton Barachovsky (violon solo), Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Mariss Jansons (direction)
Enregistré en public à la Philharmonie im Gasteig (14 et 18 mars 2011 [2]) et à la Herkulessaal der Residenz (24 et 28 février 2014 [1]), Munich – 64’55
BR Klassik 900127 – Notice (en allemand et en anglais) de Christian Wildhagen





Richard Strauss : Ein Heldenleben, opus 40 [1] – Metamorphosen [2]
Maighréad McCrann (violon solo), ORF Radio-Symphonieorchester Wien, Cornelius Meister (direction)
Enregistré en public au Konzerthaus (22 février 2013 [1]) et à la Grosser Sendesaal (17-20 février 2014 [2]), Vienne – 69’50
Capriccio C 5208 (distribué par Outhere) – Notice bilingue (allemand et anglais) de Christian Heindl


 Sélectionné par la rédaction





Voici trois nouvelles versions du magnifique poème symphonique Une vie de héros de Richard Strauss (1864-1949) qui, en confrontant trois chefs à des époques différentes de leur carrière, nous permettent de nous livrer à une comparaison des plus stimulantes.


Il peut sembler étonnant de voir le disque dirigé par Bernard Haitink publié seulement aujourd’hui alors qu’il rassemble deux extraits de concerts donnés respectivement en 1992 et en 1986. Pour autant, ne boudons pas notre plaisir car le chef néerlandais prouve une fois encore ici ses affinités avec le grand répertoire germanique, livrant tout d’abord une version extrêmement vivante et luxuriante de Don Juan (les cuivres à 11’50), où se déroule sous nos yeux une histoire pleine de fantaisie et de facéties dont on regrette qu’elle s’achève si tôt. L’interprétation d’Une vie de héros convainc un peu moins en raison d’un premier violon, tout d’abord, David Nolan, qui adopte un jeu certes virtuose mais sans toujours grande caractérisation. Dans les enchaînements ensuite, Haitink ne retrouve pas toujours l’élan qu’il avait dans sa précédente version avec l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam, le Philharmonique de Londres manquant parfois de finition (dans «La Compagne du Héros», à 6’43, ou à la toute fin de l’œuvre par exemple), l’orchestre se montrant néanmoins assez convaincant de manière générale (les sonneries des trompettes au début «Le Champ de bataille du Héros» valent l’écoute à elles seules). Pour autant, et ce n’est pas lui faire injure que de l’écrire, ce n’est pas la version de cette œuvre à retenir dans la riche discographie de Bernard Haitink.


La version que nous offre Mariss Jansons de Don Juan est, comme on pouvait s’y attendre, musicalement somptueuse, l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise faisant mugir ses cordes et ses cuivres avec un vrai sentiment de délectation. Or, c’est justement là que réside également la relative déception de cette version qui s’avère très élégante, d’une finesse au-dessus de tout éloge mais qui manque peut-être de rage et d’emportement comme on aurait par exemple aimé l’entendre à 5’48. Pour ce qui est d’Une vie de héros, il ne s’agit ni plus ni moins, au regard du minutage, que de la version discographique d’un concert filmé que nous avions déjà eu l’occasion de commenter dans ces colonnes et de couvrir d’éloges. Force est de constater que l’écoute seule nous convainc tout autant grâce à un orchestre de premier ordre. Les cors (superbes dans «Le Héros» à 3’15) rougeoient à qui mieux-mieux (quel solo dans «Le Champ de bataille du Héros» à 10’27!), les bois sont d’une finesse à tomber par terre (toujours dans «Le Champ de bataille», à 8’39 notamment), le violon solo d’Anton Barachovsky est tout à fait remarquable: que demander de plus alors? Peut-être, comme c’est parfois le cas dans ces versions trop bien léchées, un supplément d’âme et davantage de spontanéité, Jansons menant son orchestre d’une main extrêmement sûre où tout débordement est proscrit. Pour autant, quelle version!


Les débordements, c’est plutôt du côté de son cadet Cornelius Meister (né en 1980) qu’il faut les chercher. Car il signe ici un disque tout à fait remarquable. Certes, l’Orchestre symphonique de la radio autrichienne n’a pas la perfection de son homologue bavarois – les cordes offrent moins de cohésion, les cuivres affichent moins de puissance rutilante – mais quelle vie! Dès la première partie consacrée au Héros, la vision du chef allemand se veut ostensiblement théâtrale et le fait est que cela fonctionne très bien en dépit de quelques excès (le legato de cordes qui joue à plein dans «Le Champ de bataille du Héros» à partir de 0’18). Dans «La Compagne du Héros», le violon solo est exemplaire, adoptant une tonalité mutine qui faisait quelque peu défaut dans la précédente version, veillant par ailleurs à toujours adopter un jeu dont la finesse est exemplaire (notamment dans les fins de phrases). On reste par ailleurs admiratif à l’égard de la dernière partie du poème symphonique, que Meister aborde avec solennité et une plénitude sonore des plus flatteuses. Dans les Métamorphoses, sans atteindre les versions de référence, voici des cordes qui se défendent plus qu’honorablement même si l’on entend parfois quelques baisses de tension. A n’en pas douter néanmoins, voici un chef et un orchestre qui méritent les plus vifs éloges et qu’il convient de suivre avec la plus grande attention, comme il l’a encore tout récemment montré à Paris.


Le site de l’Orchestre philharmonique de Londres
Le site de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise
Le site de l’Orchestre symphonique de la Radio (ORF) de Vienne


Sébastien Gauthier

 

 

 

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