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05/01/2015
Alexander Zemlinsky : Die Seejungfrau – Sinfonietta, opus 23 (version de chambre de Roland Freisitzer)
Helsingin kaupunginorkesteri, John Storgårds (direction)
Enregistré au Centre de musique d’Helsinki (2-4 septembre 2014) – 69’25
SACD Ondine ODE 1237-5 – Livret d’Antony Beaumont en anglais et en finnois


 Sélectionné par la rédaction





Encore méconnue de la plupart des mélomanes, la fantaisie pour orchestre La Petite Sirène de Zemlinsky a connu ces dernières années un regain d’intérêt au concert grâce au chef d’orchestre russe Andrey Boreyko, défenseur de l’œuvre sur le vieux continent et aux Etats-Unis (voir ici, ici et ici). Suite à la dispersion de la partition entre plusieurs détenteurs, l’œuvre avait dû attendre son heure avant sa redécouverte par le musicologue et chef d’orchestre allemand Peter Gülke. Celui-ci en assura la recréation en 1984, près de 80 ans après la création en 1905 – grand succès auprès des critiques de l’époque qui purent entendre cette œuvre concomitamment avec le Pelléas et Mélisande de Schoenberg. Maeterlinck contre Andersen, un match déjà inégal, aggravé par la sentence sévère d’Alma Mahler: «D’abord le professeur de Schoenberg, Zemlinsky en devint plus tard l’élève».


On perçoit immédiatement à l’écoute de cette Petite Sirène combien l’inspiration créatrice des deux hommes prend déjà des chemins bien différents. Dans la lignée de la première période de Zemlinsky, marquée par deux symphonies «de jeunesse» (1893 et 1897) aujourd’hui peu jouées, cette fantaisie symphonique ne cache pas ses influences postromantiques. Le début mystérieux et un peu fuyant fait ainsi penser aux atmosphères entêtantes du Rachmaninov de L’Ile des morts, avant de saisir par sa puissance évocatrice – même si son sens mélodique reste toujours en deçà du grand maître russe. Zemlinsky impressionne surtout par ses climats évocateurs, riches et variés, portés par une luxuriance orchestrale superbe. Seul Strauss ou Schreker iront plus loin encore dans l’exubérance des timbres enchevêtrés. Contrairement à sa Symphonie lyrique (1924) plus connue, Zemlinsky évite de surcharger les parties de cuivres, proposant un entrelacs de couleurs enivrant. John Storgårds dirige un superlatif Orchestre philharmonique d’Helsinki, de surcroît magnifiquement capté, embrassant d’un grand geste romantique cette partition par l’opposition saisissante des groupes d’instruments. Très narrative, sa direction est passionnante de bout en bout.


Si le disque précise fièrement en couverture les «premières mondiales» des œuvres ici regroupées, il s’agit seulement pour La Petite Sirène d’un ajout de cinq minutes de musique coupées par Zemlinsky pour équilibrer la structure du deuxième mouvement. L’innovation la plus radicale est l’arrangement de la Sinfonietta, composée en 1934, pour un orchestre de chambre. Réalisée en 2013 par Roland Freisitzer, un ancien élève d’Alfred Schnittke, cette adaptation offre un visage encore plus moderniste à cette œuvre marquée du sceau de l’influence de Hindemith. Tout en laissant une place à l’expression du violon solo, John Storgårds offre des délices de transparence en contraste aux courts motifs tour à tour narquois et sautillants, respectant toujours le subtil équilibre des différents dialogues entremêlés. Une œuvre maîtresse idéalement interprétée – complément opportun pour bien saisir les différentes phases créatrices du maître viennois.


Florent Coudeyrat

 

 

 

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