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04/14/2015
«Schubert. Fantaisie»
Franz Schubert : Sonate n° 20, D. 894 «Fantasie» – Ungarische Melodie, D. 817 – Fantaisie pour piano à quatre mains, D. 940 [*] – Allegro, D. 947 «Lebensstürme» [*]

David Fray, Jacques Rouvier [*] (piano)
Enregistré en l’église Notre-Dame-du-Liban, Paris (3-6 novembre 2014) – 78’59
Erato 461669 9 – Notice de présentation en français, allemand et anglais





Franz Schubert : Impromptus, D. 899 et D. 935 – Litanei, D. 343 (arrangement Franz Liszt)
François Chaplin (piano)
Enregistré en l’église Saint-Pierre, Paris (2014) – 72’37
Aparté AP101 (distribué par Harmonia mundi) – Notice de présentation en français et anglais





«Schubert. Valses nobles et sentimentales»
Franz Schubert : Sonate n° 5, D. 537 – Valses nobles, D. 969 – Valses sentimentales, D. 779 – Ungarische Melodie, D. 817

Guillaume Coppola (piano)
Enregistré au Conservatoire à rayonnement départemental d’Aulnay-sous-Bois (avril 2014) – 65’10
Eloquentia EL1445 (distribué par Harmonia mundi) – Notice de présentation en français et anglais





Franz Schubert : Sonates n° 20, D. 894 «Fantasie», et n° 23, D. 960 – Impromptus, D. 935 – Moments musicaux, D. 780 – Ungarische Melodie, D. 817 – Allegretto, D. 915
András Shiff (piano)
Enregistré à l’Augustinus Muziekcentrum, Anvers (9-10 février 2014) – 145’03
Double album ECM New Series 481 1573 (distribué par Universal) – Notice de présentation en anglais





Franz Schubert : Sonates n° 15, D. 664, n° 22, D. 959, et n° 23, D. 960 – Moments musicaux, D. 780 – Ungarische Melodie, D. 817
Michael Korstick (piano)
Enregistré à la Grosser Saal Congress Centrum Pforzheim (8 août 2003 [D. 817, D. 960] et juillet 2010 [D. 664]) et à la Sendessaal de Brême (27-29 septembre 2010 [D. 780, D. 959]) – 155’08
Double album CPO 777 766-2 – Pas de notice de présentation





«Late Piano Works by Franz Schubert»
Franz Schubert : Sonate n° 23, D. 960 – Impromptus, D. 899 – Allegretto, D. 915

Nami Ejiri (piano)
Enregistré au Teldex Studio, Berlin (10-12 janvier 2014) – 78’58
Genuin 14327 – Notice de présentation en allemand, japonais et anglais





Franz Schubert : Sonate n° 17 «Reliquie», D. 840 – Fantaisie en ut majeur, D.760 «Wandererfantasie»
Paul Badura-Skoda (piano)
Enregistré en 1968 et 2009 – 56’54
Gramola 99031 – Pas de notice de présentation





Franz Schubert : Fantaisie en ut majeur, D.760 «Wandererfantasie» – Danses allemandes, D. 783
Ludwig van Beethoven : Sonate pour piano n° 16, opus 31 n° 1 – Variations et fugue, opus 35 «Eroica-Variationen»

Aaron Pilsan (piano)
Enregistré au Studio 2, Bayerischer Rundfunk, Munich (janvier 2014) – 76’
Naïve V5384 – Notice de présentation en français et anglais





La chronique discographique des œuvres de Franz Schubert (1797-1828) continue de se nourrir du flux abondant des nouvelles parutions (lire, par exemple, ici).


Ainsi du dernier disque de David Fray (né en 1981). Un précédent album consacré à Schubert avait laissé un souvenir en demi-teintes. Cette parution l’efface aisément. La Sonate en sol majeur (1826) – et son monumental Molto moderato e cantabile – posent d’emblée le ton: celui d’un Schubert aux formes maîtrisées et au souffle long. Le contrôle des nuances se fait au millimètre, au bénéfice du legato qui supporte ainsi beaucoup mieux la lenteur des tempos – pas toujours simples à soutenir. Si les déflagrations de l’Andante pourraient être plus percutantes encore, les deux derniers mouvements sont – tout comme la Mélodie hongroise (1824) – des modèles d’équilibre dans la rythmique. S’associant à Jacques Rouvier (né en 1947), David Fray décante la Fantaisie en fa mineur (1828) en lui offrant un éclairage serein sans lui ôter son éclat nostalgique. Un bien beau voyage dans les contrées du romantisme allemand, conclu par le moins inspiré Lebensstürme (1828).


Comme dans les Nocturnes de Chopin mais avec des moyens très différents (notamment dans l’usage plus retenu de la pédale), François Chaplin (né en 1963) plonge l’intégrale des Impromptus (1827) dans le romantisme et la passion. Une passion tout en douceur, qui touche par sa chaleur tiède (Sixième et Septième Impromptus) comme par le refus de l’extraversion dans le plaisir (Troisième et Cinquième). Car Schubert est, pour le pianiste français, «l’expression suprême de la fragilité de l’âme [...], l’aboutissement d’un chemin initiatique». Trop de retenue dans ce cheminement, néanmoins, pour donner à la mélodie l’envol nécessaire, le doigté butant (dans le Deuxième Impromptu, par exemple) quelque peu sur les touches. Le flux irrégulier du toucher intéresse davantage dans le Dernier et surtout dans le Quatrième, qui papillonne avec grâce et allégresse – mais sans ostentation. Un disque pour les poètes, à l’image de la vibrante mélodie (transcrite par Liszt) qui le conclut.


Guillaume Coppola (né en 1979) s’attaque à un Schubert plus rare et offre, malgré une prise de son trop réverbérée, un toucher d’une grande maîtrise dans son apparente simplicité. La Sonate en la mineur (1817) y gagne en naturel et en fraîcheur ce qu’elle n’offre pas en densité et en mystère. L’Allegretto quasi Andantino en profite tout spécialement, refusant l’obsessionnel au profit du charismatique. Mais l’intérêt de ce disque réside ailleurs. Rejoignant l’idéal ravélien, le pianiste français réunit deux séries de Valses: les douze Valses nobles (1827) et les trente-quatre Valses sentimentales (1825), pour lesquelles il avoue une passion sincère («Fraîcheur d’inspiration, géniale spontanéité, ces courtes pièces, sans être figées dans leurs immuables trois temps, m’étonnaient au contraire par un renouvellement permanent du discours. Je découvrais une musique de partage, de convivialité, une joie d’offrir des danses comme autant de cadeaux aux amis chers»). Plus noble que sentimentale, cette interprétation dévoile un Schubert d’une infinie élégance et d’une grande subtilité. L’album s’achève sur une Mélodie hongroise au toucher merveilleusement aristocratique.


C’est sur un pianoforte Franz Brodmann (1820) qu’András Schiff (né en 1953) interprète Schubert, un compositeur qu’il fréquente depuis de nombreuses années déjà. Le pianiste hongrois fait l’éloge d’un instrument «parfaitement adapté pour les œuvres de Schubert [qui] a dans son timbre quelque chose de typiquement viennois, une musicalité douce et mélancolique» («On ne pouvait imaginer les forces sombres et les abîmes profondes cachés dans sa musique. Les progressions dramatiques et les apogées éclatantes sont à couper le souffle»). C’est tout l’inverse qu’on entend dans la Dernière Sonate. L’assèchement du discours, réduit à des voix trop faiblardes, fait regretter la richesse et la variété du son des instruments modernes. Certes, le travail est admirable – permettant d’offrir un Schubert sans fioritures ni atermoiements (moins de huit minutes pour l’Andante sostenuto), aux dynamiques claires et justes, peu métaphysique mais très convaincant. L’impact émotionnel est, en revanche, amoindri par l’étouffement du legato – une caractéristique que l’on déplore dans l’essentiel des Moments musicaux.


L’instrument passe mieux dans les épanchements très «Sturm und Drang» de l’Andantino des mêmes Moments musicaux ou dans la Mélodie hongroise, teintée de couleurs nostalgiques. Une même chaleur nostalgique se love dans la sonorité des quatre derniers Impromptus, l’Allegro moderato envoûtant plus spécialement par la mécanique obsessionnelle des marteaux et l’Allegretto par l’étrangeté de ses graves. Mais c’est surtout la Sonate en sol majeur qui – malgré l’absence de vertiges – justifie les propos de l’interprète sur l’usage de ce Brodmann: l’équilibre entre la mélodie et le rythme ressort idéalement des cordes du pianoforte, András Schiff restant fidèle à sa conception d’un Schubert sobre et mesuré. Un disque plutôt exigeant de prime abord, mais qui emprunte de passionnants chemins de traverse.


«Touche-à-tout» (de Beethoven à Koechlin, en passant par Debussy), Michael Korstick (né en 1955) s’égare dans Schubert, qu’il noie dans une lenteur pesante et asséchée. Ainsi de la Dernière Sonate au martèlement vide de sens et au toucher ciselé jusqu’à l’ennui. Le pianiste allemand paraît aborder la partition en esthète hédoniste, mais la vigueur électrique de la frappe semble comme électrocuter l’âme de Schubert. L’Avant-Dernière Sonate est moins extrémiste et présente une pulsation plus naturelle, tout en dynamiques. Proche d’une étude sur le rythme, son architecture de glace demeure bien polie mais dessine peu d’arrière-plans – notamment dans l’Andantino, presque schématique. Quant aux Moments musicaux et à la Sonate en la majeur, ils sont nets et sans bavure – et par là-même souvent termes, bien que l’Andante sostenuto de la Sonate et l’Andantino des Moments musicaux (au magnétisme lunaire) dégagent une angoisse troublante. Un double album peu attachant.


Nami Ejiri (née en 1973) soigne son Schubert, qu’elle brosse avec délicatesse et sens du rythme, à l’image du Scherzo et surtout de l’Allegro ma non troppo de la Dernière Sonate – intelligemment balancés. On perçoit toutefois, dans les silences du premier mouvement, du vide davantage que de la tension émotive. C’est dommage car les dynamiques y sont souvent dignes d’intérêt – y compris dans l’Andante sostenuto – jusqu’à émouvoir sincèrement. Une version intéressante de la Sonate en si bémol. Egalement fort bien rythmés, les quatre premiers Impromptus se révèlent d’une sécheresse sans charme: un ut mineur peu séduisant, un mi bémol majeur mécanique et passé au hachoir, un sol bémol majeur tellement timide qu’il en devient somnolent, un la bémol majeur aux pointes acérées mais qui tarde à chanter. Bien qu’elle ne parvienne pas à y maintenir la tension constante, la pianiste japonaise démontre, dans l’Allegretto en ut mineur, une certaine pudeur dans la sensibilité artistique. Cette native de Tokyo, qui vit en Allemagne depuis une vingtaine d’années, est à l’évidence une excellente pianiste. Mais ce disque ne s’imposait pas.


Celui du vétéran Paul Badura-Skoda (né en 1927) non plus. La Fantaisie «Wanderer» (1822) dévoile un Schubert aux idées claires mais assez rapidement pesant, ainsi qu’un poignet mollasson (en regard d’un Pollini ou d’un Watts), voire un manque de chair dans la rondeur du toucher. L’énergie faiblit même dangereusement dans l’Allegro final. La Sonate en ut majeur donne une image plus flatteuse du talent de l’éminent pianiste autrichien. Si la pulsation demeure parfois timide, la sensibilité de la frappe touche bien davantage dans cette partition où le pianiste autrichien se révèle le plus à l’aise dans les deux derniers mouvements (laissés inachevés par Schubert). Un album à réserver aux fans de Badura-Skoda.


Quant à son jeune compatriote Aaron Pilsan (né en 1995), il ne convainc guère plus dans Schubert. Saine mais sage, sa Wanderer offre des élans brisés, qui tombent malheureusement vite à plat. La rondeur de la frappe semble davantage timide que subtile et l’interprétation en devient fade. Assez comparables de ton, les Seize Danses allemandes (1824) s’avèrent trop sages sous les poignets du pianiste autrichien. Une élégance, un raffinement, un sens de la mesure restent néanmoins appréciables. Deux partitions de Beethoven (1770-1827) complètent le disque: une Seizième Sonate dont on apprécie le geste sobre mais pas la tonalité générale – qui reste lisse et bien terne (faisant mentir une notice voyant dans «cette sonate [...] un bon exemple de l’humour de Beethoven») – et des Variations «Eroica» bâties sur un plan clair et un doigté intelligent, mais tout aussi inhibées et fades... à des années lumières d’un Richter, d’une Yudina ou d’un Gilels. Un artiste encore en formation.


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Gilles d’Heyres

 

 

 

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