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11/17/2014
Serge Prokofiev : Sonates pour piano n° 5, opus 38, et n° 6, opus 82 – Pensées, opus 62 – Musique pour enfants, opus 65
Yury Martynov (piano)
Enregistré au Teldex Studio, Berlin (21-24 janvier 2014) – 71’24
Zig-Zag Territoires ZZT 346 – Notice de présentation en français et anglais





«Russian Impulse»
Serge Prokofiev : Sonate pour piano n° 6, opus 82
Serge Rachmaninov : Variations sur un thème de Corelli, opus 42
Nikolaï Kapoustine : Variations, opus 41
Fanny Azzuro (piano)
Enregistré à La Ferme de Villefavard (date d’enregistrement non précisée) – 57’04
Paraty 314124 – Notice de présentation en français et anglais





«Russian Moments»
Serge Prokofiev : Sonates pour piano n° 2, opus 14, et n° 3, opus 28
Serge Rachmaninov : Six Moments musicaux, opus 16
Nikolaï Kapoustine : Etudes de concert n° 1, n° 2, n° 3 et n° 5, opus 40
Mario Häring (piano)
Enregistré en l’Immanuelskirche, Wuppertal (26-28 mai 2014) – 65’21
SACD hybride Ars Produktion 38 151 – Notice de présentation en allemand et anglais





Aux côtés de Rachmaninov, Chostakovitch et Scriabine, Serge Prokofiev (1891-1953) tient une place privilégiée dans le cœur des pianistes du monde entier, qui ne cessent de remettre sur le métier son œuvre variée – à commencer par ses neuf Sonates pour piano, qui s’étalent sur une quarantaine d’années d’errance entre Russie, Occident et URSS et dont plusieurs opus sont retenus dans ces trois albums.


Yury Martynov (né en 1969) ciselle en orfèvre la modernité de la Cinquième Sonate (1923), une des moins jouées – mais pas des moins attachantes. Une modernité sagement mise en valeur – presque en demi-teintes, tant la mesure et la finesse caractérisent cet interprète qui est également un claveciniste distingué. Un style qui charge les Pensées (1934) de vapeurs embrumées, aussi vaguement dessinées qu’inquiétantes et véloces à la fois. Martynov allant, pour reprendre les mots d’André Lischke dans la notice, «jusqu’au bout de l’abstraction méditative du compositeur», obligeant «l’interprète autant que l’auditeur à un effort pour en dépasser la sensation d’aridité [...], laissant surgir des îlots de tonalités bientôt brouillées par des harmonies imprévisibles».


A vouloir appliquer la même approche interprétative aux douze pièces de la Musique pour enfants (1935), ces dernières manquent quelque peu de fraîcheur – de vigueur aussi. Une vigueur retrouvée dès le début de la Sixième Sonate (1939), sans la «hardiesse barbare» (Sviatoslav Richter) qu’on attendrait dans cette partition charnière, mais avec beaucoup de subtilité. Le Vivace final ne se départ jamais non plus d’une certaine tenue – sorte d’élégance désespérée, d’autant plus étonnante qu’elle succède aux tonalités franchement dépressives du troisième mouvement.


Un Prokofiev angoissant, très singulier – un peu trop marginal pour convaincre pleinement. Mais qui confirme le talent protéiforme de Yury Martynov, qui poursuit, par ailleurs, son enthousiasmante intégrale des Symphonies de Beethoven transcrites par Liszt.


Il captive pourtant davantage que le geste trop anguleux de Fanny Azzuro (née en 1986) dans cette même Sixième Sonate de Prokofiev. Carré voire raide, le toucher se tend sans s’enrichir dans l’Allegro moderato, manquant de densité. Mais l’interprétation est fraîche et maîtrisée, respirant une espièglerie de bon aloi dans l’Allegretto et même dans le Vivace – superbement dominé.


Les Variations sur un thème de Corelli de Serge Rachmaninov (1873-1943) dégagent une douceur inhabituelle. On craint de la mollesse par moments, mais on arrive à bon port – sur un climax émotionnel introduisant la Coda de la plus belle des manières. D’autres Variations, celles composées en 1984 par Nikolaï Kapoustine (né en 1937) comme un hommage (jazzy) au Sacre du printemps de Stravinski, apportent une touche de décontraction fort réussie à cet album au demeurant édité avec soin.


Avec son album baptisé «Russian Moments» (et non «Russian Impulse» comme celui de Fanny Azzuro), le pianiste allemand Mario Häring (né en 1989) se tourne, lui aussi, vers la Russie (voir la vidéo de présentation). Et vers Kapoustine dont il livre quatre des Huit Etudes de concert, exaltant la vigueur du «Prélude», l’abandon de la «Rêverie», le swing de la «Toccatina» et l’extase de la «Plaisanterie». La frappe est plus dense que celle de son aînée française, avec un équilibre naturel et un sens évident de l’architecture.


Les Moments musicaux de Rachmaninov viennent le confirmer. On y admire la poésie, la finesse, le recul dans l’emballement (y compris dans le Quatrième, éloigné de toute vulgarité). L’inspiration pourrait, par moments, être stimulée (un Troisième Moment musical plutôt vide, un Cinquième quelque peu aplati) et l’exécution se terminer par un Maestoso moins littéral, plus extériorisé. Mais l’artiste est jeune – et mûrira son Rachmaninov.


Son Prokofiev parle le langage de la jeunesse lui aussi, Mario Häring retenant les Deuxième et Troisième Sonates – l’œuvre d’un homme d’une trentaine d’années. La Sonate en ré mineur est une incontestable réussite, le pianiste allemand parvenant à varier les climats et les rythmes – jusqu’à l’emballement motoriste du Vivace conclusif. Quant à l’audacieuse Sonate «D’après des vieux cahiers» (avec son mouvement unique découpé en huit sections), elle gagnerait à davantage de radicalité dans les nuances et le toucher, mais elle permet à Mario Häring de faire la démonstration qu’il est de toute évidence un interprète à suivre.


Le site de Yury Martynov
Le site de Fanny Azzuro
Le site de Mario Häring


Gilles d’Heyres

 

 

 

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