About us / Contact

The Classical Music Network

CD

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

08/15/2014
Edward Elgar : The Dream of Gerontius, opus 38 – Symphonie n° 1 en la bémol majeur, opus 55
Michelle Breedt (mezzo-soprano), Peter Auty (ténor), John Hancock (baryton), Collegium Vocale Gent, deFilharmonie, Edo de Waart (direction)
Enregistré à Antwerp (février 2013) – 142’25
Album de deux SACD PentaTone Classics PTC 5186 472 – Notice trilingue, textes non inclus


 Sélectionné par la rédaction







En 1899, peu après la composition des Variations Enigma (opus 36, 1898-1899), l’une de ses partitions les plus originales et les plus réussies, Sir Edward Elgar (1857-1934) entreprenait son opus 38, Le Songe de Géronte. A son achèvement en 1900, clairvoyant, il le déclarait pénétré du « meilleur de lui-même» («This is the best of me»).


Henry Newman (1801-1890), cardinal, logicien, polémiste brillant et poète, fervent catholique en pays anglican, publia en 1864 le poème The Dream of Gerontius. Elgar, catholique également, le connaissait sans doute depuis l’enfance mais le dessein de le mettre en musique ne se concrétisa qu’à l’occasion d’une commande pour le festival de Birmingham 1900. Lyrique et d’une sensibilité extrême, le poème décrit dans la première partie le passage de la vie à la mort et, dans la seconde, l’errance de l’âme jusqu’au purgatoire. Le compositeur s’en inspira pour écrire une œuvre fortement intériorisée, un poème mystique à la fois symphonique et vocal auquel il refusa que soient associés les termes «oratorio» ou «cantate», genres alors très à la mode. Effectivement, la forme en est plus dramatisée dans le sens où ce n’est pas sous forme de témoignages – les personnages interviennent directement, ce jusqu’au chœur qui assume les rôles des proches de Géronte, d’anges, de démons et d’âmes au purgatoire, sa fonction loin de celui du chœur antique. Comme le musicologue Bruno Moysan l’exprime si bien, la composition évite, cependant, «toute forme de dramatisme rhétorique» grâce à «la maîtrise, de la part d’Elgar, de la relation entre écriture contrapuntique, mobilité harmonique et orchestration», essentielle pour la mener à bien.


Malgré la force, la beauté et la profonde spiritualité de l’œuvre, les interprétations restent presque exclusivement britanniques. La parution de cette récente version sous la baguette d’Edo de Waart est donc à saluer à plusieurs titres, la finesse de la direction d’orchestre non le moindre. Il obtient des textures somptueusement détaillées et porteuses de sens, que ce soit le poignant Prélude initial, l’instant fracassant de la première vision de Dieu, ou la luminosité finale qui distille un sentiment de grande paix intérieure. Peter Auty, totalement investi, campe un Géronte toujours émouvant sans jamais forcer la note, que ce soit pour l’agitation intérieure du Géronte mourant de la première partie ou dans les poignantes angoisses de l’Ame de la seconde. Son expressivité passe par une diction claire et par la chaleur discrète d’une voix de ténor légèrement italianisante. En revanche, la voix de Michelle Breedt, sombre et serrée dans le grave, plus épanouie dans l’aigu, ne convainc guère dans un premier temps. Son interprétation de l’Ange semble très extérieure mais petit à petit, malgré une diction floue, elle s’engage davantage et regagne la sensibilité nécessaire, avant son beau «Softly and gently» conclusif. John Hancock ne convainc pas davantage dans le rôle du Prêtre, son timbre restreint et son large vibrato assez gênant, mais sa plaidoirie tout en retenue en tant que l’Ange de l’Agonie de la seconde partie trouve la juste mesure.


Les interventions du chœur sont à chaque fois splendides. L’excellence du Collegium vocale de Gand porte cette version très haut. Leur interprétation évite le surdimensionné de certaines versions plus postromantiques pour trouver une très grande pureté de ligne, de ton et de beauté vocale. Bien qu’il existe au disque des Démons plus ouvertement diaboliques, le vif contraste entre les Proches, les Démons et les Anges gantois souligne l’engagement du Collegium tout autant que sa maîtrise. «Praise to the holiest» en particulier, soutenu par un orchestre attentif et en phase, passe d’une subtile délicatesse à une brûlante plénitude sonore.


En complément de programme, Edo de Waart propose la Première Symphonie, écrite sept ans plus tard. Classiquement en quatre mouvements, avec l’Adagio en troisième position, l’œuvre est plus formelle et d’une toute autre nature, la profondeur de la charge émotionnelle bien moindre. Son ancrage reste plus nettement germanique malgré un chromatisme très poussé à l’occasion et des passages d’une légèreté de touche surprenante bien qu’à la réflexion tout aussi elgarienne que sa fréquente indication «Nobilmente» qui marque ici comme ailleurs des thèmes de marche majestueuse. La Philharmonie royale des Flandres l’interprète avec beaucoup d’allant et de délicatesse, teintés d’un lyrisme de bon aloi.


Pour les deux œuvres, les interprétations ne manquent pas, l’ensemble souvent dominé pour les mélomanes par les trois grands «B» – Barbirolli, Boult et Britten. L’intensité et la hauteur de vue intactes, Edo de Waart, ses musiciens et le Collegium vocale de Gand apportent à The Dream of Gerontius un éclairage moins direct, peut-être moins fiévreux, mais le choix de trois solistes du monde de l’opéra n’est sans doute pas innocent. La finesse de la prise de son met bien en valeur le grand relief orchestral et les pupitres divisés du chœur, l’équilibre entre les solistes et les ensembles atteint.


Le site de Michelle Breedt
Le site de John Hancock
Le site de la Philharmonie royale des Flandres
Le site du Collegium vocale de Gand


Christine Labroche

 

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com