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04/08/2014
Johannes Brahms : Symphonies n° 1, opus 68 [1], n° 2, opus 73 [2], n° 3, opus 90 [3], et n° 4, opus 98 [4]
Discovering Brahms: Christian Thielemann on Brahms’s Symphonies [5]

Sächsische Staatskapelle Dresden, Christian Thielemann (direction), Yoko Ishida (réalisation, [1, 3]), Henning Kasten (réalisation [2, 4]), Christoph Engel (réalisation [5])
Enregistré en public au NHK Hall de Tokyo (22 octobre 2012 [1, 3]) et au Semperoper de Dresde (24-27 janvier [2] et 7-9 avril [4] 2013) – 260’
Coffret de deux Blu-ray Unitel Classica/CMajor/Sächsische Staatskapelle Dresden/NHK 715204 (ou coffret de trois DVD 715108) – Son PCM Stereo – Format NTSC 4:3 – Region Code ABC – Notice trilingue (anglais, allemand et français) de Julia Spinola





Bien que tenant de la grande tradition allemande, Christian Thielemann ne passe pas pour un brahmsien de la première heure. Il l’a certes déjà enregistré – notamment une décevante Première Symphonie en juin 2005 à la tête des Müncher Philharmoniker dont il était alors chef titulaire et, plus récemment, les deux Concertos pour piano avec Maurizio Pollini – et plusieurs fois dirigé en concert, qu’il s’agisse de sa première venue à Paris à la fin du mois de mai 2001 à la tête de l’Orchestre du Deutsche Oper de Berlin – là encore la Première Symphonie, après un premier concert dédié à Wagner – ou du magnifique Requiem allemand donné notamment avec l’Orchestre de la Staatskapelle dans le cadre d’un Gedenkkonzert commémorant, comme chaque année au mois de février, la destruction de Dresde à la fin de la Seconde Guerre mondiale.


L’intégrale qui nous est ici proposée est le fruit de trois concerts, respectivement donnés à Tokyo dans le cadre du dixième anniversaire du NHK Music Festival et au Semperoper de Dresde. Avant d’en venir à l’interprétation proprement dite, signalons d’emblée la qualité irréprochable de l’image et du son, où la spatialisation des pupitres et la netteté des interventions sont très bien rendues. Même si l’on n’attendait pas fatalement de grande originalité de ce côté-là, la diversité des plans s’avère très convenue, les caméras alternant sagement vues sur le chef, sur l’orchestre dans son ensemble et sur les solistes lorsqu’ils interviennent. Pour autant, l’effet est parfois très beau comme cette enfilade de violoncelles dans la Deuxième Symphonie (à partir de 1’14’40) ou, dans la Première, le jeu de caméras se fixant sur les timbales à la fin du premier mouvement, excellente idée de la part du réalisateur nippon Yoko Ishida. En outre, cette manière de filmer permet au téléspectateur de profiter pleinement de la direction de Thielemann qui, moins saccadée qu’on a pu la voir en d’autres occasions, joue à la fois sur le minimalisme et sur l’importance d’un regard très dur, le visage demeurant imperméable à la moindre émotion sauf en de rares sourires. Qu’il s’agisse de la Première (à 12’20), de la Troisième (à partir de 14’50) ou de la Quatrième (dans le quatrième mouvement à 1’21’50), les yeux du chef allemand maîtrisent souverainement et à eux seuls l’orchestre qui sait y répondre de façon quasi instantanée même si l’on observe parfois de légers décalages: sans nul doute, c’est impressionnant.


En raison à la fois d’une tradition interprétative bien ancrée et de musiciens exceptionnels, l’Orchestre de la Staatskapelle de Dresde donne de son côté un résultat du plus haut niveau. Les grandes figures de l’orchestre sont là, pas toujours au même moment d’ailleurs: si le Konzertmeister est Matthias Wollong à Tokyo dans les Première (excellent solo dans le deuxième mouvement Andante sostenuto) et Troisième symphonies, c’est en revanche son collègue Kai Vogler qui occupe la place à Dresde pour les Deuxième et Quatrième; Bernd Schober œuvre au hautbois solo dans les Première et Quatrième mais ce sont ses collègues qui interviennent dans les deux autres. De même, si Bernhardt Schmidt est le timbalier dans la Troisième, c’est son camarade Thomas Käppler qui officie dans les trois autres, le concert japonais donnant d’ailleurs lieu à plusieurs changements de pupitres entre les première et seconde parties, comme c’est effectivement parfois le cas dans les orchestres en tournée. Enfin, signalons la présence pour la moins inhabituelle du clarinettiste solo du Philharmonique de Berlin, Andreas Ottensamer, dans la Deuxième! Au-delà des personnalités – comment oublierait-on également l’excellent cor solo de Erich Markwart dans le dernier mouvement de la Première? –, l’orchestre se caractérise par une cohésion impressionnante, des legatos de cordes tout à fait admirables qui se développent sur une puissante ligne de basses (l’orchestre comptant il est vrai pas moins de huit contrebasses et seize premiers violons...), et par des cuivres d’une rondeur et d’une intensité incroyables.


L’interprétation des Symphonies de Brahms par Dresde et Thielemann qu’il nous est ici donné d’entendre souffre néanmoins des reproches habituels que l’on peut faire à ce chef, en premier lieu une regrettable et trop fréquente lourdeur. Que ce soit dans le finale de la Troisième, au début de celui de la Quatrième ou dans la Première (dans le premier mouvement à 10’20 ou dans le troisième à respectivement 28’ et 29’15), il alourdit une pâte sonore pourtant déjà fort riche. Par ailleurs, il opte pour de soudains changements de tempo qui, sans que cela se justifie vraiment, ne s’avèrent pas toujours du meilleur effet (la fin de la Deuxième, à partir de 1’37’20, est assez exemplaire de ce point de vue). Pour autant, encore une fois, face à une telle luxuriance orchestrale et en dépit de réussites plus ou moins éclatantes – la Troisième mérite sans aucun doute le détour, la Deuxième s’avère, elle, franchement décevante –, comment ne pas être pris par cette intégrale globalement de très haute volée?


En complément des quatre Symphonies, un documentaire de près de 50 minutes intitulé Discovering Brahms: Christian Thielemann on Brahms’s Symphonies sous la forme d’un entretien avec le chef, entrecoupé d’extraits de concerts, qui disserte sur ces œuvres et sur les caractères propres à chacune d’entre elles. On apprend ainsi que c’est la Troisième qui lui fait la plus forte impression, la plus difficile (elle ne compte ni fin triomphale, ni véritable mouvement lent) et la plus subjective à ses yeux. Par ailleurs, Thielemann, qui aime à user d’images pour mieux illustrer ses propos, insiste par exemple sur l’importance du tempo dans la Première, sur le caractère printanier de la Deuxième et sur le caractère exubérant du troisième mouvement de la Quatrième, qu’il compare d’ailleurs à une journée de l’Oktoberfest! Sans être indispensable, ce documentaire explique en tout cas une large partie des options choisies tant pour les tempi que pour les nuances: à ce titre, il mérite d’être visionné en premier lieu, avant même les concerts proprement dits.


Le site de l’Orchestre de la Staatskapelle de Dresde


Sébastien Gauthier

 

 

 

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