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01/16/2014
Richard Wagner : Siegfried

Stephen Gould (Siegfried), Christian Elsner (Mime), Tomasz Koniecnzy (Der Wanderer), Violeta Urmana (Brünnhilde), Jochen Schmeckenbecher (Alberich), Matti Salminen (Fafner), Anna Larsson (Erda), Sophie Klussmann (Stimme eines Waldvogels), Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin, Marek Janowski (direction)
Enregistré en public à la Philharmonie, Berlin (1er mars 2013) – 227’30
Coffret de trois SACD hybrides Pentatone Classics PTC 5186 408 – Notice de présentation en français, anglais et allemand





Siegfried est probablement le jalon le plus périlleux d’un Ring. Après d’incontestables réussites dans L’Or du Rhin et La Walkyrie, Marek Janowski – fidèle au credo de son nouveau cycle wagnérien avec la Radio berlinoise (des enregistrements de concerts apparemment issus d’une captation unique) – s’y révèle un peu moins convaincant.


Certes, sa direction demeure une source de surprises et d’excitation. Cursive, voire déchaînée par instants, la baguette souligne toutes les voix secondaires (bien aidée en cela par une prise de son toujours exemplaire). Elle crée un fabuleux théâtre – un peu artificiel parfois mais au chambrisme séducteur. Rappelant par certains aspects Karajan (la désincarnation des voix, traitées comme des instruments), elle témoigne souvent d’une grande inventivité, l’accompagnement se faisant globalement alerte et jamais paresseux. La rapidité des tempos peut néanmoins surprendre. Ainsi, la transition entre les deuxième et troisième scènes du premier acte aboutit à une déferlante orchestrale rarement entendue ailleurs. Janowski imprime également une violence inouïe à la scène de la forge – dans le flux symphonique comme dans la hargne à laquelle il accule les chanteurs. A d’autres moments, la cavalcade tourne à la précipitation, comme au début du troisième acte – presque bâclé (la deuxième scène notamment)... avant que le chef ne se réveille vraiment (sur le «Das ist kein Mann!»).


La distribution est assez inégale. Les amants butent sur la difficulté de leurs rôles. Le Siegfried de Stephen Gould, qui semble déjà à bout de souffle lors de son entrée en scène, est trop barytonant (des aigus douloureux dans le forte et de peu de charmes dans la douceur). La voix gagne toutefois en assise une fois chauffée, bien qu’elle manque de souplesse et d’élasticité... Et aussi de justesse! C’est l’acte central qui le met le plus à l’aise: moins bousculé par les tempos d’enfer du chef, il y expose un timbre équilibré (malgré une fin fort laborieuse). Au dernier acte, la Brünnhilde de Violeta Urmana est très «en phase»: chantant juste, elle fait son possible pour dominer sa redoutable intervention terminale. Poussée dans ses retranchements, la voix reste néanmoins trop sèche pour séduire. Mais le duo avec Siegfried s’écoute sans frémir... ce qui est déjà beaucoup.


Articulant certaines syllabes avec une perversité prononcée, Christian Elsner est un Mime impeccable, avec de la ressource dans la voix. Un style un peu trop classique – surtout en regard de son Loge magistral dans le Prologue (où Andreas Conrad chantait d’ailleurs un Mime qu’on aurait aimé entendre ici) – et un deuxième acte en retrait (malgré une diction toujours impeccable) donnent le sentiment d’une maîtrise encore incomplète du personnage. Elsner est pourtant autrement plus marquant que le Wanderer placide et neutre de Tomasz Koniecnzy, qu’on avait quitté sur une impression très positive après la déception de L’Or du Rhin. Ici, comme indifférent aux choses, il récite son texte sans convaincre.


Très investi, l’Alberich de Jochen Schmeckenbecher est malheureusement desservi par une voix trop claire dans la projection et trop humaine dans la caractérisation. Son personnage brisé n’en est pas moins attachant – émouvant par là même qu’il se fait plus Amfortas qu’Alberich. Si l’Oiseau de Sophie Klussmann gazouille sans charme, l’Erda (un peu usée) d’Anna Larsson fait le job – efficacement. On n’attendait pas, en revanche, de Matti Salminen – à ce stade de sa carrière – un Fafner aussi admirablement rocailleux, effrayant et brutal. Sa maîtrise du rôle impressionne d’autant plus qu’il parvient habilement à changer de registre au moment d’expirer – avec prestance et dignité.


Un Wagner inégal mais de bonne tenue.


Gilles d’Heyres

 

 

 

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