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01/14/2012
Georg Friedrich Händel : Die Acht Grossen Suiten, HWV 426 à 433

Lisa Smirnova (piano)
Enregistré au Schloss Goldegg, Autriche (11-12 juin 2007, 27-28 mai 2008, 15-16 février 2009) – 105’17
Album de deux disques ECM New Series 476 4107 (distribué par Universal)





Sélectionné par la rédaction


En 1720, Georg Friedrich Händel (1685-1759) a pris la décision d’éditer et de faire publier une première série de huit «leçons» pour clavecin composées sans doute avant son installation en Angleterre en 1712 et entièrement révisées. Son but était la disqualification de certaines copies clandestines toujours en circulation qui comportaient souvent des erreurs. Indirectement grâce à ce «piratage» d’autrefois, Händel lègue un des plus beaux recueils de suites pour clavecin de son époque. Les Suites de pièces pour clavecin (titre rédigé en français) sont révélatrices de la grande culture d’un jeune musicien déjà européen, capable de synthèse cohérente des styles allemand, français et italien. L’élément allemand se trouve plus particulièrement dans la clarté des lignes, dans l’art de la fugue et dans le style de certains préludes quand ce n’est pas celui des ouvertures à la française. La France se trouve encore dans les suites de mouvements de danse et dans quelques échos rythmiques, peut-être, de François Couperin, son aîné. L’Italie s’épanouit dans les airs sur basse continue et l’enchaînement en quasi-sonate de suites de pièces nommées en italien (adagio, allegro...). Aucune Suite ne relève d’un seul genre. L’élément transcendant et unificateur est Händel lui-même.


Lisa Smirnova, pianiste d’origine russe établie en Autriche depuis plusieurs années, propose une des rares intégrales du recueil. Au clavecin, la plus marquante est peut-être celle de Scott Ross et, au piano, si celle de Ragna Schirmer reste peut-être trop pleine, trop résonnante, on ne peut oublier celle, quoique très pianistique, de Sviatoslav Richter (Suites n°s 2, 3, 5 et 8) et Andrei Gavrilov (n°s 1, 4, 6 et 7) captée en direct au château de Marcilly-sur-Maulne. C’est peut-être dommage que la fervente interprétation de la pianiste française Racha Arodaky ne profite pleinement qu’à quatre d’entre elles (voir ici), mais Lisa Smirnova a moins recours aux pédales même dans des Suites qui soulignent les liens étroits entre le compositeur et l’orgue et sa version précise, fringante et sensible, sur un piano aux timbres bien réglés, est un véritable hommage à la beauté intrinsèque et à la portée universelle de ce premier et plus grand recueil de Suites de pièces de Händel.


Avant d’accepter que son interprétation soit confiée au disque, la pianiste avait longuement étudié et travaillé les huit Suites de ce recueil et en avait conçu une vision personnelle des possibilités offertes ou refusées au pianiste. Elle a pris la décision de ne pas en respecter l’ordre et c’est à remarquer que le caractère des quatre premières Suites élues (n°s 2, 8, 4 et 5) est plus fluide et moins grandiose dans son ensemble que celui des quatre suivantes (n°s 3, 6, 1 et 7) qui évoquent par moments la plénitude de l’orgue. Son intégrale ouvre sur la fine retenue de l’Adagiode la Suite n°2, annonciateur de élégance de l’ensemble en quatre mouvements quasi una sonata, pour terminer sur la splendide Suite n°7, la plus variée des huit et en un sens leur synthèse et leur juste conclusion. Les doigts véloces de la pianiste courent sur l’Allegro à l’italienne et ornementent avec délicatesse la noble et tendre Sarabande pour clore sur la célèbre Passacaille aux variations nuancées, leur apothéose un éclatant feu d’artifice de virtuosité bienvenue. Entre-temps, Lisa Smirnova, grâce à son toucher subtil, joue avec adresse sur les dynamiques et sur les contrastes entre accords appuyés, motifs piqués et piquants, envolées de notes et chutes en cascade. Etincelante, elle mène les mouvements rapides à vive allure, plus sobre, elle révèle l’âme vive des adagios, allemandes et sarabandes. Les dernières pièces de chaque suite sont souvent brillantes, exigeant une légèreté véloce ou beaucoup de panache qu’elle leur accorde sans affectation. Dans celle de la célèbre Suite n°5, son fameux air d’emprunt («L’Harmonieux forgeron») suivi de cinq éblouissants Doubles, elle préserve avec brio la clarté des strates. Sensible à sa noblesse particulière, elle rend pleinement justice à la Suite n°6, plus austère et si souvent écartée. C’est un signe.


Lisa Smirnova est une pianiste pleinement accomplie et ses choix esthétiques sont le résultat d’une réflexion longuement murie. Avec les encouragements des titres allemand (Die Acht Grossen Suiten) et anglais (Eight Great Suites, Eight London Suites) sans mention d’instrument, le subtil équilibre de son interprétation maîtrisée permettra momentanément aux puristes de ne plus du tout regretter le caractère particulier que le clavecin prête à la musique. C’est un ensemble réjouissant.


Le site de Lisa Smirnova


Christine Labroche

 

 

 

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