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05/03/2010
Antonio Vivaldi : Concertos pour basson RV 493, RV 495, RV 477, RV 488, RV 503, RV 471 et RV 484
Sergio Azzolini (basson), L’Aura Soave Cremona, Diego Cantalupi (direction)
Enregistré au Santuario di Ariadello, Soresina (novembre-décembre 2009) – 74’45
Naïve/Opus 111 OP 30496 – Notice trilingue exhaustive (français, anglais et italien) de Michael Talbot





A propos des jeunes filles jouant de la musique à l’Ospedale della Pietà, le président Charles de Brosses écrivait, en 1739 : « Elles sont éduquées aux dépens de l’Etat, et on les exerce uniquement à exceller dans la musique. Aussi chantent-elles comme des anges, et jouent du violon, de la flûte, de l’orgue, du hautbois, du violoncelle, du basson ; bref, il n’y a si gros instrument qui puisse leur faire peur ». Une fois encore, Antonio Vivaldi (1678-1741) se distingue par rapport à nombre de ses collègues puisqu’il est un des premiers à composer pour le basson même si les Allemands Johann Friedrich Fasch, Johann Georg Pisendel ou Matthias Weckman ou le Français Etienne Ozi ont également écrit quelques œuvres à son intention. Ce qui différencie le Vénitien, c’est la quantité produite : Vivaldi a, en effet, composé trente-neuf concertos spécifiquement pour le basson (vraisemblablement entre 1728 et 1737) mais aussi des concertos pour hautbois et basson (notamment le superbe RV 545 en sol majeur), des concertos pour divers instruments dont un ou deux bassons (le célèbre Concerto per l’orchestra di Dresda RV 577 en sol mineur ou le Concerto RV 566 en ré mineur), sans compter des concertos où la basse est assurée par le basson voire le contrebasson (tel est notamment le cas du Concerto « Sua Altezza reale di Sassonia » RV 576) ! Antonio Vivaldi, dont on ne cesse d’admirer combien il a su exploiter la dextérité de tous les instruments de son époque, a ainsi cherché à utiliser au mieux les possibilités d’un instrument alors construit en quatre pièces et dont la tessiture couvrait plus de trois octaves : il y est sans nul doute parvenu.


Les sept concertos présentés dans ce disque complètent utilement deux précédents opus de cette magnifique collection, respectivement consacrés aux concertos pour hautbois et basson (Sergio Azzolini étant déjà à l’œuvre) et aux Concertos de Dresde qui, là aussi, permettaient d’entendre toutes les subtilités mélodiques d’un instrument dont l’essor ne surviendra véritablement qu’à l’époque classique.


Après une très brève introduction où l’orchestre est doublé par le soliste, le Concerto RV 493 se distingue rapidement par la très grande douceur des cordes qui offrent au basson un écrin pour que celui-ci puisse utilement développer sa mélodie. Contrairement à certains autres concertos, Vivaldi ne cherche pas ici la dextérité à tout crin : bien au contraire, la technique (même si elle existe) n’est appelée qu’au strict service de la mélodie (écoutez par exemple le vrombissement généré par le basson au milieu du troisième mouvement). Le Concerto RV 495 est d’une tout autre trempe : ostinato des violons, accents des basses, volutes musicales... Tout n’est que tourbillonnement sonore au milieu duquel Sergio Azzolini improvise tant sur le rythme que sur les notes qui doivent être jouées : un pur régal ! Derrière les thèmes imposés, on ne peut également s’empêcher de remarquer la grande théâtralité dont fait montre le soliste (la note tenue du basson au début du Largo) qui nous renvoie ainsi l’image d’une Venise en proie à une véritable folie musicale. Bien différent est également le Concerto RV 477 où l’esprit distillé par les cordes et l’orgue se veut aimable, le basson n’intervenant qu’à bon escient sans nuire à l’équilibre trouvé au sein du petit orchestre. Le troisième mouvement est exceptionnel de virtuosité mais aussi du fait des changements incessants (brèves saccades rythmiques, accélérations soudaines, le basson se montrant tour à tour enjôleur ou volontairement brusque), qui mettent ainsi à rude épreuve un instrument dont les capacités techniques paraissent sans véritable limite.


Le Concerto RV 488 est d’une structure plus simple, ce qui fait très justement dire à Michael Talbot, dans sa notice, qu’il s’agit là « d’un des plus anciens concertos enregistrés ici », Vivaldi n’ayant pas encore donné la pleine mesure de son imagination. Il est vrai que les trois mouvements restent d’un agencement assez peu élaboré, les mélodies elles-mêmes ne se caractérisant pas par une grande recherche même si le troisième mouvement (Allegro) recèle quelques trouvailles rythmiques qui génèrent un certain effet de surprise pour l’auditeur. Le Concerto RV 503 est plus caractéristique de l’œuvre de Vivaldi dans son climat, dans les schémas mélodiques énoncés une première fois par les violons, repris ensuite par les basses : il est indéniablement plus tardif que les autres, le jeu du clavecin et les sonorités annonçant avec une certaine évidence le classicisme naissant. On soulignera tout particulièrement la beauté poignante du Largo où les silences sont encore plus importants que les notes jouées tant ils leur permettent d’exprimer avec plénitude leur lot d’émotions.


Enfin, pour conclure ce disque, deux concertos qui sortent du lot. En premier lieu, le Concerto RV 471 est un pur chef-d’œuvre où la ritournelle de l’orchestre accompagne idéalement un basson qui joue avec lui au jeu du chat et de la souris tant l’un semble courir après l’autre. Surtout, le Larghetto se caractérise par des couleurs sombres qui font basculer l’auditeur dans un climat recueilli et sobre à la fois. L’Allegro est également superbe, les contrastes de nuances palliant sans difficulté une mélodie moins recherchée que dans d’autres concertos. Le Concerto RV 484 est-il le plus connu des concertos pour basson de Vivaldi ? Le fait qu’il ait été immortalisé par I Musici dans un disque dirigé par Claudio Scimone (paru chez Erato au début des années 1980) n’y est peut-être pas étranger. La comparaison avec la présente version est intéressante pour montrer d’une part la liberté prise par les baroqueux de notre époque et, également, pour rappeler que Scimone a été et demeure, à travers quelques-uns de ses enregistrements, un interprète de tout premier plan de la musique de Vivaldi. Entre les deux, la version la plus ancienne conserve une vitalité que l’interprétation de Sergio Azzolini délaisse quelque peu (notamment dans le premier mouvement) au profit d’une plus grande musicalité et de couleurs plus aimables (le jeu entre le soliste et l’orgue à la fin de l’Allegro poco est magnifique) : à défaut de choisir, on ne peut en tout état de cause que conseiller d’acheter le présent volume qui continue d’ancrer la Vivaldi Edition dans l’excellence.


Le site de L’Aura Soave Cremona


Sébastien Gauthier

 

 

 

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