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06/18/2009
Richard Strauss : Till Eulenspiegels lustige Streiche, opus 28 – Ein Heldenleben, opus 40

Radoslaw Szulc (violon solo), Orchestre Philharmonia, Christoph von Dohnányi (direction)
Enregistré en concert au Southbank’s Centre du Royal Albert Hall, Londres (30 juin 2001 [Till] et 4 octobre 2007 [Heldenleben]) – 59’08
Signum Classics SIGCD 148 (distribué par Intégral) – Notice en anglais






En 1993, Christoph von Dohnányi nous avait déjà offert de très belles versions de ces deux poèmes symphoniques de Richard Strauss (1864-1949) à la tête de son cher orchestre de Cleveland. Excellent interprète de ce répertoire qu’il ne cesse de remettre sur le métier tant au disque qu’au concert (voir ici et ici), le voici cette fois à la tête de l’Orchestre Philharmonia, phalange prestigieuse dont il est aujourd’hui « chef honoraire à vie » : une fois encore, le reflet de deux concerts qu’il nous est ici donné d’entendre est une totale réussite !


Les plaisantes facéties de Till l’Espiègle remonte à 1894 ; il s’agit du quatrième poème symphonique du jeune Richard Strauss. Achevée en mai 1895, la partition est créée avec succès à Cologne en novembre de la même année sous la direction du compositeur. Bénéficiant au disque de nombreuses interprétations de qualité (Kempe, Karajan, Böhm, Strauss lui-même dans un récent et extraordinaire disque paru chez Testament), Till est ici de nouveau parfaitement servi. L’Orchestre Philharmonia, même s’il n’a plus l’aura d’antan, demeure une phalange dont l’excellence réside aussi bien chez les solistes (les clarinettes, le violon solo, les trompettes) que dans les tutti. Avec beaucoup de souplesse et de théâtralité, Dohnányi donne une très belle interprétation de cette courte pièce (le coup final suscite très justement l’enthousiasme du public !), veillant à ne jamais se départir d’un dynamisme qui, plus que jamais, nous raconte à livre ouvert une merveilleuse histoire.


D’un héros à l’autre, le disque se poursuit avec Une vie de héros, poème symphonique de plus grande ambition où apparaissent certaines mélodies chères au compositeur qui innervent l’ensemble de son œuvre orchestral. Une fois les esquisses de la partition achevées en juillet 1898, Strauss se lança à corps perdu dans l’orchestration qui l’occupa jusqu’au début de l’année 1899, la création ayant eu lieu au mois de mars 1899, à Berlin. Alors que certains musicologues y ont vu une peinture musicale des visées belliqueuses du Kaiser Guillaume II, d’autres ont estimé soit qu’il s’agissait de la traduction sur une partition de la philosophie nietzschéenne d’hostilité manifestée à l’égard du monde extérieur, soit des « conflits intérieurs » de l’artiste (ainsi qu’a pu l’écrire Michael Kennedy dans sa biographie du compositeur publiée chez Fayard). En effet, à l’instar de nombreuses autres de ses compositions, Une vie de héros est avant tout l’occasion pour Strauss de réfléchir sur lui-même, de se décrire, de peindre ses interrogations, ses doutes et ses sentiments. Là réside pour une bonne part toute la complexité de l’œuvre : derrière la peinture naïve de telle ou telle scène, il faut gratter pour découvrir la part de lui-même que Strauss a pu y instiller. Pour s’être depuis longtemps confronté à ce répertoire, Christoph von Dohnányi se joue de tous les écueils, évitant de s’en tenir à une description pure et simple du « Héros », préférant la suggestion à l’évidence grossière. Une fois encore (on rappellera pour mémoire la Sinfonia domestica), une partie très importante de l’œuvre est confiée au violon solo, censé incarner la femme du héros, nouvel hommage que Strauss rend à sa chère Pauline avec laquelle il s’est marié quelques années auparavant. Tour à tour implorant et mutin, doux et capricieux, le violon de Radoslaw Szulc tient parfaitement sa partie (essentiellement la troisième du poème), parvenant à un superbe équilibre entre musicalité et technique. La première partie, « Description du héros », est emportée par un souffle épique qui, loin de les amenuiser, emporte avec lui les délicates interventions solistes : on admirera l’attention portée aux moindres détails, la prise de son étant d’ailleurs remarquable de bout en bout. Comme souvent dans les poèmes symphoniques de Strauss, Ein Heldenleben se conclut par une apothéose sonore faisant figure de page méditative (on le retrouve par exemple aussi bien dans Mort et transfiguration que dans la Symphonie alpestre) où dominent cor anglais et cordes. Cette dernière partie est totalement renversante, le fracas sonore laissant place au cor solo avant que les pleurs de l’épouse endeuillée par la mort du héros ne conduisent à la fin de l’œuvre. Christoph von Dohnányi la dirige avec résignation, concluant ainsi de la plus belle manière un disque qui, au sein d’une concurrence pléthorique, fait néanmoins très belle figure.


Sébastien Gauthier

 

 

 

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