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Energie canalisée

Paris
Salle Pleyel
09/21/2011 -  et 22 septembre 2011
Igor Stravinski : Scherzo fantastique, opus 3
Edouard Lalo : Concerto pour violoncelle
Nikolaï Rimski-Korsakov : Shéhérazade, opus 35

Marc Coppey (violoncelle)
Orchestre de Paris, Yutaka Sado (direction)


Y. Sado (© Yuji Hori)


Yutaka Sado ayant quitté en 2010 l’Orchestre Lamoureux, dont il était le chef principal depuis 1993, les occasions se font désormais rares de retrouver ce chef charismatique, toujours très populaire tant auprès du public que des musiciens et dont le tempérament expansif est bien celui de l’un des derniers élèves de Bernstein: excellente initiative de l’Orchestre de Paris, avec lequel il s’est déjà produit en septembre 1999, mars 2002, avril 2003, novembre 2003 et mai 2006, que de le réinviter.


«Je vois à présent que j’ai emprunté quelque chose au Vol du bourdon de Rimski-Korsakov; mais le Scherzo doit bien plus à Mendelssohn, par l’intermédiaire de Tchaïkovski, qu’à Rimski-Korsakov.» Cité dans le programme de salle, c’est Stravinski lui-même qui, un demi-siècle après avoir écrit le Scherzo fantastique (1908), suggérait ce rapprochement inattendu, qui surprend toutefois moins à propos d’une page de jeunesse – il n’avait alors que vingt-six ans. Le confort sonore de l’Orchestre de Paris et la direction engagée de Sado laissent également entendre ce que ces dix minutes à l’instrumentation recherchée – quatre flûtes, quatre clarinettes, trois harpes mais pas de timbales – doivent encore au Poème de l’extase tout en posant les premiers jalons de L’Oiseau de feu (que Diaghilev commanda après avoir assisté à la création de ce Scherzo).


Le Concerto russe (pour violon) de Lalo aurait tendu un fil rouge entre Stravinski et Rimski, mais c’est son Concerto pour violoncelle (1876) qui a été choisi. Alors que le compositeur demeure surtout connu pour sa Symphonie espagnole, ce concerto se maintient presque aussi bien au répertoire, puisqu’il réapparaîtra dès le 10 avril prochain Salle Gaveau (avec Sergueï Slovachevsky accompagné par l’Orchestre Colonne) et qu’au cours des quatre précédentes saisons, plusieurs des meilleurs solistes du moment l’ont déjà joué dans la capitale: Henri Demarquette, Mischa Maisky et Marc Coppey. Ce dernier se révèle comme l’un de ses grands défenseurs, puisque c’est lui qui, trois ans après l’avoir interprété avec le National au Théâtre des Champs-Elysées (voir ici), la reprend de nouveau salle Pleyel. Lourde succession, puisque la seule et unique programmation de l’œuvre à l’Orchestre de Paris – où, du même coup, il fait, à quarante-deux ans, ses débuts – remonte à Paul Tortelier et Paul Paray en 1978 – une association qui fait rêver les moins de cinquante ans! Mais cette musique, où dominent, dans une élévation de pensée et une construction originale qui n’ont guère à envier à Franck ou à Saint-Saëns, une véhémence et un lyrisme hautains, parfois presque austères, contrebalancés par des épisodes au parfum espagnol dans les deux derniers mouvements, convient idéalement à son archet à la fois net et souple, à son style à la fois pudique et frémissant. Et il ne manque pas non plus de souffle, comme le montre en bis la Sarabande de la Sixième Suite de Bach.


A l’issue de l’entracte, il rejoint les rangs des spectateurs pour la seconde partie de la soirée. Si elles ne sont pas si rares que cela, les deux pièces données en première partie ne peuvent évidemment rivaliser en célébrité avec Shéhérazade de Rimski, proposée par l’Orchestre de Paris voici seulement trois ans sous la direction de Rafael Frühbeck de Burgos (... qui la reprendra la 17 février prochain avec le Philharmonique de Radio France). Comme dans le Scherzo de Stravinski, Mendelssohn n’est pas loin, la succession d’accords lunaires des bois au début du premier mouvement étant manifestement inspirée de l’Ouverture du Songe d’une nuit d’été. Mais le cœur du sujet n’est évidemment pas là, surtout sous la baguette vivante et inspirée de Sado: quinquagénaire depuis quelques mois, il n’a rien perdu de son efficacité et de sa fougue, dont témoigne sa saisissante manière d’empoigner la matière. Cette énergie semble cependant aujourd’hui davantage canalisée que par le passé, au profit de progressions superbement graduées, de l’attention portée à de savoureuses sonorités, du plaisir de prendre de son temps et d’une vision aussi subtile que la partition le permet, à l’image d’un troisième mouvement qui sait rester onctueux sans devenir sirupeux. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que les musiciens s’illustrent avec brio, au premier rang desquels le violon sensible et généreux de Roland Daugareil – et comment ne pas mentionner le phénoménal Giorgio Mandolesi, notamment dans son solo initial du deuxième mouvement?


Le site de Yutaka Sado
Le site de Marc Coppey



Simon Corley

 

 

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