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08/19/2011
Giovanni Battista Pergolesi: L’Olimpiade

Raffaella Milanesi (Aristea), Ann-Beth Solvang (Argene), Olga Pasichnyk (Megacle), Jennifer Rivera (Licida), Martin Oro (Alcandro), Jeffrey Francis (Clistene), Markus Brutscher (Aminta), Academia Montis Regalis, Alessandro de Marchi (clavecin et direction)
Enregistré en concert au Tiroler Landestheater d’Innsbruck (6, 8, 10 et 12 août 2010) – 227’56
Coffret de trois disques Deutsche Harmonia Mundi 88697807712 (distribué par Sony) – Notice exemplaire de Francesco Degrada et traduction trilingues des textes chantés (anglais, allemand, français et italien)





En dépit de sa courte vie, Giovanni Battista Pergolèse (1710-1736) a définitivement marqué l’histoire de la musique grâce à son Stabat Mater qui fait depuis longtemps figure de pièce phare de la musique religieuse. On sait peut-être moins que Pergolèse est également l’auteur de plusieurs opéras dont les plus célèbres sont certainement La Serva Padrona (1733) et Adriano in Siria (1734), la postérité de ce dernier ouvrage étant fondée à la fois sur le livret de Métastase et sur les airs colorés dédiés à l’un des grands castrats de l’époque, Caffarelli. Le présent coffret nous livre la seule version qui soit actuellement disponible de L’Olimpiade, «dramma per musica» en trois actes créé à Rome en janvier 1735, toujours sur un livret de Métastase, qui inspira maints compositeurs, d’Antonio Vivaldi à Leonardo Leo en passant par Johan Adolph Hasse. Etrange destinée d’ailleurs que celle de cette Olimpiade, qui fut un opéra extrêmement populaire de Pergolèse au point d’être donné dans l’Europe tout entière dans les années suivant sa création, avant de connaître, dès le début des années 1740, une brutale et durable éclipse que seul le présent enregistrement vient rompre.


L’action, fort complexe et où il ne faut en rien s’offusquer du manque de cohérence et de vraisemblance, narre les amours entre Aristea, fille du roi Clistène, et Megacle, son amant, qui devait être pour sa part promis à la princesse crétoise Argène. Sous couvert d’entraide et de préservation de l’honneur des uns et des autres, les différents protagonistes se livrent, pendant plus de trois heures, à un jeu de dupes qui, comme souvent, se termine bien, puisque Licida (sous les traits duquel Megacle s’était caché pour participer aux jeux Olympiques organisés par Clistène et ayant pour prix la main de sa fille Aristea) épouse Argène tandis que Megacle est uni à Aristea!


Peu importent les affres incompréhensibles de ce livret et la longueur parfois imposante des récitatifs (mais qui, en définitive, ne nuit en aucune façon à l’écoute de l’œuvre et au suivi de l’action) puisque la musique de Pergolèse emporte tout sur son passage. En effet, on ressort de cette écoute empli de plaisir et d’émotion comme l’a visiblement été le public, la bande ayant été captée lors de concerts captés à Innsbruck en août 2010. Certes, on reconnaît bien volontiers que les voix ne sont pas toujours à la hauteur des défis techniques de la partition. Ainsi, les aigus d’Olga Pasichnyk sont un peu difficiles dans l’air «Superbo di me stesso» (acte I, scène 2), mais on ne peut nier l’élan dont elle fait preuve tout au long de sa prise de rôle. Raffaella Milanesi, sûrement la chanteuse la plus connue de l’équipe, n’est pas davantage exempte de faiblesses (son air, à la scène 6 du premier acte, «Tu di saper procura», comporte lui aussi quelques aigus criards), mais, sur l’ensemble de l’œuvre, elle est une magnifique Aristea, qui séduit autant par son tempérament que par son chant. Regrettons peut-être un peu trop de sagesse dans l’air «Tu me da me dividi!» (acte II, scène 11), mais la faute en incombe davantage à l’orchestre et, en l’occurrence, au violon solo, qui reste trop sur la réserve: on y reviendra. Dans le rôle d’Argene, Ann-Beth Solvang est excellente, livrant notamment un entraînant et splendide «Più non si trovano fra mille amanti» (acte I, scène 7). Soulignons également l’air «Che non mi disse un di?» (acte II, scène 4), qui témoigne d’une voix mélancolique à souhait, en dépit d’un vibrato parfois trop présent. Même si elle n’atteint pas l’émotion que pouvait nous procurer Simone Kermes dans ce même passage, Jennifer Rivera parvient tout de même à nous éblouir dans l’air «Mentre dormi Amor fomenti» (acte I, scène 8), tenant avec une suprême élégance le rôle de Licida. Il faut, à ce titre, immédiatement se reporter à l’air «Quel destrier che all’albergo è vicino», à la scène 3 du premier acte (quelle verve!) ainsi qu’à l’air concluant le deuxième acte «Gemo in un punto e fremo» (scène 15).


Les voix masculines ne sont pas en reste et participent pleinement de la réussite de cette gravure. Commençons par ce qui est peut-être le plus beau passage de l’opéra, en tout cas en ce qui concerne le rôle d’Aminta: l’air «Son qual per mare ignoto» (acte III, scène 6). Même s’il force un peu dans les aigus, Markus Brutscher est exceptionnel tout au long de ce passage long d’à peine cinq minutes grâce à un charme dans la voix et à une prestance dans l’incarnation du personnage d’Aminta tout à fait prodigieux. C’est bien simple: dès que l’air est terminé, on se précipite pour l’écouter de nouveau tant on reste incrédule lors de la première audition! Soulignons également sa prestation dans l’air tout aussi formidable «Siam navi all’onde algenti» (acte II, scène 5), accompagné par des cordes, des hautbois et des cors superlatifs. Dans le rôle d’Alcandro, Martin Oro est tout aussi excellent: pour s’en convaincre, il suffit d’écouter l’air «L’infelice in questo stato» au début de l’acte III (scène 2), malheureusement amoindri par quelques malencontreuses glissades de violons. Dans le rôle de Clistene, Jeffrey Francis est également très bon même s’il ne se voit pas confier d’air spécialement remarquable.


A la tête de l’Academia Montis Regalis, Alessandro de Marchi dirige avec beaucoup d’entrain une partition extrêmement riche, qui requiert des cordes pleines, des cuivres à la hauteur (cors et trompettes par deux) et des bois (flûtes à bec, basson, hautbois) fort adroits. Dès l’Ouverture, la musique jaillit et réhabilite avec force une partition qui, avec plusieurs décennies d’avance, annonce Mozart (le final!) ou, en tout cas, mérite d’être rapprochée de certaines œuvres du baroque tardif comme le magnifique oratorio L’Ascension et la Résurrection de Jésus de Carl Philipp Emanuel Bach. On a déjà pu signaler quelques défauts que l’enregistrement en concert ne peut gommer (des cordes à la justesse parfois imparfaite, une énergie qui manque dans quelques passages), mais, globalement, l’orchestre rend véritablement hommage à une œuvre dont, il faut le rappeler, on tient ici la seule version disponible. Pour les curieux mais, bien au-delà, pour les amateurs de belle musique, voici un magnifique coffret qui, hors des sentiers battus, mérite donc sans nul doute d’être acquis.


Le site de Raffaella Milanesi
Le site d’Ann-Beth Solvang
Le site d’Olga Pasichnyk
Le site de Jennifer Rivera
Le site de Martin Oro
Le site de Markus Brutscher
Le site de l’Academia Montis Regalis


Sébastien Gauthier

 

 

 

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